Le Contrat Social - anno III - n. 6 - novembre 1959

QUELQUES LIVRES W. Laqueur a eu le temps de signaler à la fin de son ouvrage les premiers symptômes de cette détérioration des rapports soviéto-arabes : la fusion Égypte-Syrie « dont l'union est venue surprendre Moscou » (p. 260 ), l'hostilité du Caire envers Bagdad et le jeu du parti communiste irakien : « Il est certain que les communistes irakiens ont reçu des conseils de modération et ont été sommés de partager provisoirement le pouvoir plutôt que de le monopoliser», écrit l'auteur en terminant, observation pleinement confirmée depuis la parution du livre. BRANKO LAZITCH. Anniversaire hongrois L'Année 1919 en Hongrie. Recueil de matériaux pour le 4oe anniversairede la Républiquesoviétique de Hongrie (en russe). Moscou 1959, Éditions d'État, 272 pp. LES COMMUNISTES ne peuvent pas aborder un fa_it historique sans le dénaturer à leurs fins ; plus le fait se rapporte à l'histoire communiste proprement dite, plus. le mensonge devient grossier. La disparition de Staline et la « déstalinisation» relative qui a suivi n'ont pas réduit l'ampleur de ces falsifications systématiques ; elles ont seulement changé leur contenu, comme le démontre ce recueil consacré ai1 quarantième anniversaire de la première République soviétique de Hongrie. A cet égard, l'exemple fourni par Béla Illés, écrivain communiste, autrefois . « rakosiste » bon teint, aujourd'hui « kadariste » dévoué, est pleinement significatif: alors qu'après I 94 5, dans un opuscule à la gloire de Rakosi, il réussit à passer sous silence le nom même · de Bela Kun à propos de la révolution hongroise, dans le présent recueil il consacre tout un article élogieux à Bela Kun, entre temps «réhabilité» à Moscou et à Budapest, mais cette fois il oublie entièrement Rakosi. Dans ce livre de près de 300 pages les événements essentiels liés à la Hongrie soviétique font défaut, à commencer par la prise communiste du pouvoir. Deux articles la mentionnent, mais sans donner la seule précision importante, à savoir que - pour reprendre une formule de Trotski - « le pouvoir leur [aux communistes hongrois] fut mis sous le nez par la bourgeoisie échouée dans une impasse». Dans ces deux articles les auteurs se contentent d'écrire : « Le 21 mars 1919 la Hongrie fut proclamée République soviétique » (p. 18) et « Le 21 mars fut fondée la République soviétique de Hongrie » (p. 25). Pourtant, il y a une phrase de Lénine, noyée dans un texte incohérent, qui confirme : u La bourgeoisie elle-même a remis le pouvoir aux communistes en Hongrie» (p. 35). Il manque également un autre document fondamentalsur la Hongriesoviétique : la liste des Biblioteca Gino Bianco 387 membres du gouvernement révolutionnaire. Rakosi, commissaire à la Production, .:n'est mentionné qu'une seule fois incidemment ; Georges Lukacs, commissaire à l'instruction publique, est complètement ignoré et Joseph Pogany, commissaire à la Guerre, plus tard fonctionnaire important de l'appareil du Komintern avant de disparaître dans les massacres sta1iniens, est même violemment dénigré. D'autres fondateurs de la République soviétique de Hongrie sont « réhabilités », mais d'une manière discrète, honteuse et indirecte (comme le font également Khrouchtchev et sa direction collective en URSS): Férenz Janczik, chef de la Garde rouge, Emo Seidler, commissaire politique de l' Armée rouge hongroise, Béla Vago, commissaire adjoint à l'Intérieur - tous trois réfugiés en URSS et tous les trois morts dans la période de 1938-40, ce qui rend leur cas plus que suspect ... Moscou ayant décidé de célébrer le quarantième anniversaire de la Hongrie soviétique tout en cachant ce que cet événement avait été en réalité, les textes choisis pour ce recueil devaient répondre à ce double impératif. A cet égard, les rédacteurs se sont acquittés de leur tâche : un discours de Janos Kadar, des souvenirs de Ferenc Muennich qui en toute modestie cite son propre nom immédiatement après celui de Bela Kun en tant que fondateur du P.C. hongrois, des extraits pêle-mêle d' œuvres de Lénine, des poèmes et des narrations lyriques à la gloire de la Hongrie soviétique font qu'un lecteur non initié ne saura, à la fin de sa lecture, rien de plus qu'avant de commencer. B. L. La culture des perles JEAN GAUDEFROY-DEMOMBYNES: La Religion de la Culture. Paris 1958, Nouvelles Éditions Debresse, 286 pp. PoL YGRAPHE, polyglotte, musicologue, ancien élève de !'École des Sciences politiques, docteur ès lettres et professeur au collège de Carpentras (Vaucluse), auteur d'une Histoire de la musique française, d'une Histoire des États-Unis, d'études sur Musset, Hugo, Maupassant, traducteur d'ouvrages anglais et allemands (notamment de Mein Kampf en 1934), enfin et surtout héritier d'un nom respectable, M. Jean GaudefroyDemombynes ne ·manque pas de titres. Mais La Religion de la Culture est une de ces œuvrcs pieuses dont on hait les vertus. Tout, dans ce livre aurait dû susciter l'intérêt au départ. Les projets de l'auteur étaient grands. 11 s'agissait, nous dit-on, tout bonnement « de parcourir, avec l'intention de faire partager ses découvertes à de futurs lecteurs, les vastes domaines de la pédagogie, de la sociologie, de la philosophie, en ne craignant pas de plus d'aborder des questions d'actualité telles que la co- • •

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