382 de Gaulle pftt marquer en si peu d'années tant .de points contre l'homme d'État antagoniste, et avec le concours déclaré du parti auquel L. Blum s'était identifié. A cet égard, il est curieux, sans que l'on en prenne avantage sur lui, que Guy Mollet, principal signataire de la motion du 38° Congrès rejetant la politique antérieure, relève en première ligne parmi les « erreurs politiques et tactiques commises depuis la Libération : - Attachement et soumission à de Gaulle »... Mais d'août 1946 à mai 1958, bien des choses ont changé de sens. AIRS DE BRAvouRE pour le Parti ? ·Dès son retour de déportation, à la conférence des secrétaires fédéraux du 20 mai 1945, voici comment L. Blum s'exprime : « Je vois un parti plus nombreux, plus puissant et plus ardent qu'il ne l'a jamais été (...) Je vois une .organisation de presse comme jamais nous n'en avons possédée. Je vois un Populaire plus fort qu'il ne l'a jamais été, etc. » - pour en venir, moins de trois mois après, à proclamer devant le 37e congrès du Parti « le socialisme maître de l'heure ». Amplification, certes, stimulation rituelle et trop souvent inconsidérée, que l'auteur devait ramener à la proportion de simples encouragements. Car le parti « le plus puissant» va essuyer, coup sur coup, de sévères mécomptes, perdant un million de voix aux élections du 2 juin 1946, puis 750.000 à celles du 10 novembre. Car l'organisation de presse « comme jamais » tient à la spoliation des entreprises réalisée par les trois partis prenants de l'époque : est-ce à cela que pense L. Blum lorsque, dans le même discours, il déclare : « Jamais nous n'attacherons trop d'importance à l'assainissement moral de ce pays (...) J'ai l'impression de me retrouver au milieu d'un pays, comment dire, corrompu » ? Car le Populaire, jouissant en 1945 du monopole de fait que s'était attribué la presse de la Résistance - toujours dans le même discours, L. Blum observait cependant : « La Résistance ne crée des droits au pouvoir au profit de personne», - le Populaire allait manifester sa « force », jadis réelle, en sombrant peu d'années après comme journal politique d'information. Exaltation de certains dirigeants socialistes ? Ici, comme toujours, les servitudes de parti et de tendance sont lourdes ; elles paraissent plus pesantes encore avec le recul, qui n'est pourtant que d'une douzaine d'années. Parmi les exemples, notons seulement que les deux camarad~s que nomme L. Blum à son retour de déportation sont Vincent Auriol et Daniel Mayer. · Du premier il fera dans la suite, entre autres éloges, l'apologie comme président de la République, lui « qui montre par l'exemple ce que Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL peut être, ce que doit être, la fonction présidentielle en régime démocratique » (Populaire, 22 mars 1947) - compliment ambigu si l'on se souvient qu'au cours de ces deux annéesJL. Blum alconstamment montré la nullité de la fonction présidentielle, à laquelle il s'est résigné, après le rejet du premier projet constitutionnel, à la condition de ne lui accorder aucun pouvoir. Quant au deuxième, sa fiche de consolation, à l'heure où le Parti 1l'évince de son secrétariat - général, c'est que « le miraculeux travail de résurrection accompli depuis la Libération » restera attaché à son nom (1er septembre 1946). Or, ni l'un ni l'autre ne sont plus membres. du parti qui reste ·celui de L. Blum, encore que ni l'un ni l'autre ne paraissent s'être retirés de la vie politique. Dans le même ordre d'idée, le dithyrambe en l'honneur du président de l' Assemblée, puis du gouvernement triparti, paré de toutes les vertus (Populaire, 24 janvier 1946), s'il reste dans la note consacrée, semble passer un peu les bornes de la solidarité partisane ; il doit même offusquer la « modestie naturelle » que L. Blum accorde à son modèle. · INTERPRÉTATIONsystématiquement optimiste et souvent arbitraire des faits ? É~oquant le prilblème· constitutionnel dans la France de la Libération, qui se cherche,. L. Bltim ne se fait pas faute de trancher d'avance en énonçant le sentiment. populaire tel qu'il le perçoit. Lorsque ce sentiment s'est ensuite exprimé dans un sens différent de 1~ prévision, comme lors du rejet du premier projet constitutionnel, L. Blum, tout en lâchant le lest nécessaire et sans cacher ses préférences pour l'assemblée 11nique et le régime des partis, interprète audacieusement le vote populaire, afin de parer au danger le plus pressant, la position du général de Gaulle: · Le pays désire un Exécutif capable d'une action énergique et continue, mais agissant dans le sens de sa volonté souveraine. Il a rejeté l'autre Constitution parce qu'elle était taillée à la mesure d'un parti. Il n'accepterait pas la nouvelle si elle lui paraissait taillée à la mesure d'un homme (7-8 juillet 1946). Six semaines plus tard, le 23 août 1946, il y • revient en ces termes : Le pays (...) ne voulait pas davantage d'un pouvoir exécutif indépendant de l'Assemblée souveraine. Enfin, lorsqu'il adjure les électeurs du second projet de ,Constitution de le voter « pour la République», c'est à de Gaulle qu'il s'en prend ouvertement : ' L'adoption d'une Constitution du type Bayeux., sur l'intervention personnelle du :Général, après une campagne dnminée par la personne du Général., aurait •
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