380 succession revenant au collectivisme. Or, de l'aveu même de Khrouchtchev, qui a pu le cons- - tatef de visu, le capitalisme ne se porte pas si mal. De fait, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, il ne connaît plus les crises dévastatrices qui faisaient naguère périodiquement annoncer son agonie; c'est la preuve que par son évolution interne il commence à surmonter une anarchie réputée constitutive de sa nature. Selon les marxistes, ce serait le signe que la marche à la collectivisation gagnerait le domaine nonmarxiste. Mais qui disait donc que les deux systèmes étaient aussi inconciliables que l'eau et le feu ? Il subsiste une différence : en régime « capitaliste » les travailleurs restent maîtres de défendre leurs intérêts par le libre choix du bulletin de vote, l'organisation syndicale libre et la grève. Certains régimes capitalistes ont supprimé ces droits. Pendant la dernière guerre, on en vit d'autres ne pas reculer devant l'alliance militaire avec le collectivisme oriental pour détruire le fascisme et aller jusqu'à remettre les travailleurs ainsi « libérés » audit collectivisme. Ces considérations nous conduisent en M4. M4. - La collectivisation représente-t-elle l'aspiration propre à la classe ouvrière dans sa lutte contre le patronat du capitalisme privé ? Selon Lénine, dans Que faire ?, le prolétariat est spontanément réformiste plutôt que révolutionnaire, de telle sorte que la conscience socialiste doit lui être importée - importation d'origine intellectuelle bourgeoise et cependant bénéfique pour l'accomplissement des destins de l'humanité. Eu égard à cette conception, on peut dire que le bolchévisme n'a pas été moins «révisionniste)> par rapport au marxisme classique que le réformisme dont Bernstein fut le théoricien. Plus tard, dans L'impérialisme, stade suprêmedu capitalisme, Lénine tentera d'expliquer le réformisme spontané du prolétariat des pays capitalistes avancés en lui attribuant un caractère « aristocratique » et en supposant que ces nouveaux aristocrates bénéficiaient en partie du produit de_ la sur-exploitation du · sous-prolétariat colonial. Si la constatation initiale de Que faire ? demeure fondée, il n'en va pas ainsi de l'hypothèse de L' Impérialisme. Après la chute des empires coloniaux, leur niveau «aristocratique» n1ayant pas Biblioteca Gino Bianco DÉBATS ET RECHERCHES baissé pour autant, les « ci-devant » ne se sont pas haussés spontanément à la conscience révolutionnaire. L'explication ne s'était d'ailleurs jamais appliqu.ée aux États-Unis d'Amérique, où le caractère aristocratique du prolétariat, joint à son peu de conscience socialiste, fut et demeure éclatant. Si, d'autre part, le régime collectiviste a pu s'instaurer dans une partie de l'Europe à la suite de la dernière guerre, ce fut à la pointe des baïonnettes, non par l'effet de la propagande. Ainsi, le schéma de Quefaire ? lui-même ne vaut plus dans sa totalité. Peut-il être retenu en ce qui concerne la révolution de 1917 ? Il faut distinguer l'écroulement du tsarisme, provoqué par le raz de marée paysan, du coup d'Etat bolchévique. Le Parti était à l'époque faiblement implanté dans la classe ouvrière d'un immense pays peu avancé en matière de capitalisme. Dans le monde actuel, les statistiques le montrent en règle générale, l'influence du marxisme bolchévique varie en raison inverse du niveau de développement industriel capitaliste, donc du poids spécifique /, représenté par la classe ouvrière. La révolution bolchévique chinoise est la dernière confirmation de cette loi. Si l'on identifie marxisme et bolchévisme, tout se passe exactement à rebours de la prédiction marxiste. Du marxisme considéré sous le rapport de l'adéquation restent donc MI et une partie de M3. Les ultra-révisionnistes à la conscience malheureuse se réfugie~t en général en Mr, ce qui facilite une conversation théologique avec les philosophes chrétiens. Du point de vue scientifique, il serait plus opportun de s'inquiéter de la signification du fragment rémanent de M3 (collectivisme non prolétarien). Dans cette perspective, nous ne nous dissimulons pas les imperfections du présent essai. Procédant sans contrainte exté- • ' • • A r1eure a notre autocnt1que, avouons nous etre fait la part belle en réduisant le marxisme à son aspect vulgaire - vulgarisé - et en nous débarrassant avec désinvolture des questions techniques soulevées par les analyses du Capital. Nous reviendrons sur les aspects scientifiquement ou -philosophiquement plus subtils d'une - grande doctrine. AIMÉ PATRL , •
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