P. BARTON 147 mi11ions le 17 décembre 1926 (recensement) et de 165.7 .mi11ionsle 1er janvier 1933 (estimation officielle), s'éleva à 170.5 millions. Pour les douze années séparant les deux recensements, l'accroissement moyen fut de I .23 % par an, chiffre considérablement inférieur à ceux cités ci-dessus pour le commencement de cette période, ainsi qu'au taux enregistré à la fin (2.05 % en 1938). La population augmenta. de 18.7 millions au cours des six années 1927-1932, mais seulement de 4.8 millions pendant les six années suivantes. Certains groupes ethniques furent surtout atteints : tandis que l'ensemble de la population de l'URSS s'accroissait de 15 .9 % entre les deux recensements, le nombre des Ukrainiens diminuait de I o % ; celui des Kazaks, peuple particulièrement frappé par les persécutions qui avaient accompagné la collectivisation de l'agriculture, était même réduit de 22 o/o. Dans une étude publiée en 1934 par l'Institut démographique de l'Académie des sciences de l'URSS, Novosselski et Païevski présentèrent une projection soigneusement mise au point sur la base du recensement de 1926. Suivant leurs calculs, il devait y avoir 191.1 millions d'habitants à la date du 1er janvier 1939 13 • L'écart entre ce nombre et celui qui fut relevé le 17 janvier 1939 représente approximativement le déficit démographique provoqué par l'application du premier plan quinquennal, la terreur contre les paysans, l'extension du travail forcé et les épurations. Cet écart se monte à plus de 20 millions. Le bien-fondé de ce calcul - contesté par Lorimer et dont la plupart des études entreprises en Occident ne tiennent aucun compte - est confirmé par l'écart entre le mouvement démographique réel et les prévisions figurant dans le premier et le second plan quinquennal : la population fut inférieure aux effectifs escomptés de 5.5 millions après le premier plan et de 13.7 millions à la fin du second 14 , ce qui donne un total de 19.2 millions, voisin du chiffre ressortant de la projection en question. Une autre confirmation, très indirecte il est vrai, s'offre à nous : la chute des effectifs des écoles professionnelles au moment où elles ont dû être fréquentées par les jeunes gens nés au milieu des convulsions des années 30. Tandis que de 1946 à 1950 ces écoles avaient compté 3.392.000 élèves (moyenne annuelle de 678.400), leurs effectifs descendirent à 1.709.000 en 19511955 (moyenne annuelle de 341.800), à 320.000 en 1956 et à 237.000 en 1957. Même pendant la guerre, ils n'étaient pas tombés aussi bas, se chiffrant pour les années 1941-1945 à 2.475.000, ce qui correspond à une moyenne annuelle de ----- 13. S. A. Novossclski et V. V. Paievski : u Des caract~- ristiqucs g~nérales de la reproduction et des estimations perspectives de la population 11, Léningrad 1934, p. 16. 14. Scrae N. Prokopovicz : op. cir., p. 62, Biblioteca Gino Bianco • 367 495.000 15 • De plus, l'ampleur de la chute n'est pas entièrement révélée par cette comparaison puisque la période de référence, 1946-1950, fut elle-même marquée vers la fin par l'entrée en scène des classes creuses 16 , ce qui ne permit pas d'atteindre dans ce domaine l'objectif du plan : la formation au cours de cinq ans de 4. 500.000 jeunes ouvriers qualifiés, soit 900.000 en moyenne par an 11. Les indices relatifs à l'ensemble de la période entre les recensements de 1926 et de 1939 tendent d'ailleurs à dissimuler la véritable étendue du mal : celle-ci se produisit en fait dans l'espace de quelques années. Au cours des deux années de famine 1933 et 1934, la population a subi, selon les estimations de Prokopovicz, une diminution absolue de 6.4 millions d'âmes ; si l'on tient également compte de la croissance naturelle normale, la perte démographique s'élève même à environ 9 millions 18 • Dix années tragiques Le peuple ne fut pas plutôt sorti de cette deuxième épreuve qu'il fut précipité dans la troisième, plus redoutable que les précédentes. Les sources officielles estiment a posteriori la population à la date du 1er janvier 1940 à 191.7 millions, en précisant que ce chiffre n'englobe pas les 1 .4 million d'habitants des territoires « cédés » à la Pologne en vertu du traité de 1945 19 • Nous avons d'évidence affaire à un faux. Ou le chiffre constaté par le recensement du 17 janvier 1939 a été truqué pour minimiser le déficit de la période précédente, ou bien l'estimation relative au 1er janvier 1940 cherche délibérément à atnenuiser les effectifs atteints à cette 'date pour catnoufler les pertes ultérieures ; ils se peut aussi que les deux hypothèses soient vraies. Toujours est-il que par les annexions de 1939-1940 le pouvoir soviétique se procura 12. 5 millions de sujets supplémentaires dans les provinces orientales de la Pologne, 6 millions dans les pays baltes et 3.7 millions en Bessarabie et en Bucovine, au total plus de 22 millions 20 ; selon une décla15. « L'URSS en chiffres. Recueil statistique », Moscou 1958, p. 331. - Pour opérer avec des données commensurables, nous ne tenons pas con1pte des écoles de mécanisation de l'agriculture, créées à partir de 1953 seulement et dont les effectifs ont évolué comme suit : 719.000 pour les années 1953-55, 118.000 en 1956 et 93.000 en 1957. Dans le même ordre d'idées, nous faisons abstraction des écoles techniques établies à partir de 1954 : 27 .ooo élèves en 1954-55, 90.000 en 1956, 81.000 en 1957. 16. Cf. Lucien Laurat : u L'économie soviétique en 1955 » Est et Ouest, 1-15 mars 1956. 17. N. A. Voznessenski : Le Plan quinquennal de l'URSS 1946-1950, Paris 1946, p. 43. 18. Serge N. Prokopovicz : op. cit., p. 66. 19. L'Économie nationale de l'URSS. R c11eil statistique, Moscou 1957, p. 15. 20. W. S. Woytinsky et E. S. Woytinsky : World Pop"- lation and Production, New York 1953, pp. 45-46 ; Annuaire statistique d, la Sociit, dis Nations 1942-/944, Gen~ve 1945 S.d.N., p. 19. •
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