Le Contrat Social - anno III - n. 6 - novembre 1959

Anniversaire de P.-J. Proudhon Pierre-JosephProudhonest mort enjanvier 1865, à l'âge de cinquante-sixans. Il laissaitonze Carnets, bien connus des spécialistes, qui constituent son journal intime et dont la publicationfut envisagée à diversesreprises.Grâceaux concoursde la Bibliothèquenationale, du Centre.national de la recherche scientifique,de la Librairie Marcel Rivière et Cie, et avec l'accord des descendants de Proudhon, Mlle Suzanne Henneguy, M. et Mme Emmanuel Fauré-Frémiet, ce souhait presque séculaire va enfinêtreréalisé.Souslehautpatronagedu C.N.R.S., les deux premiers volumes (il y en aura cinq ou six) vont paraître chez Rivière, à qui l'on doit déjà la nouvelle édition des Œuvres complètes. Lorsque P.-J. Proudhon entreprit la rédaction de son journal, en juillet 1843, il avait trente-quatre ans. Il éprouva d'abord le besoin de jeter un regard sur l'ensemble de sa vie : ce sont les « Mémoires sur ma vie », qui forment la pré/ ace indispensable des Carnets. En voici des passages : B suis NÉ à Besançon, le 15 janvier 1809, de Claude-François Proudhon, tonnelier, brasseur, natif de Chasnans, près Pontarlier, département du Doubs ; et de Catherine Simooio, de Cordiron, paroisse de Burgille-lèsMamay, même département. Mes ancêtres de père et de mère furent tous laboureurs francs, exempts de corvées et de main-mortes, depuis un temps immémorial. JeanClaude Simooin, mon grand-père, du côté maternel, surnommé Tornési •, parce qu'il avait f~t les guerres de Hanovre dans le régiment de ce nom, fut célèbre dans son village par son audace à résister aux prétentions des seigneurs, par son mariage avec Marie Gloron, fille unique, recherchée pour sa figure et sa bonne conduite, et par ses querelles avec les gardes forestiers, agents des seigneurs, qui le r11inèrent à force d'amendes, mais dont l'un paya pour tous. Dans une affaire qui se passa sans témoin, le nommé Brézet fut assommé par J.-C. Simonin, et mourut des suites au bout de quelques jours, sans accuser personne. A son lit de mort, il reconnaissait l'instrument de la vengeanœ céleste dans la main de Tornési • Noua avons longtemps conservé comme relique, un nouveau testament en français, qui lui avait ~é donné par \' aum6nier du rqimcnt. Biblioteca Gino Bianco Il s'agit d'une édition intégrale, dont chaque volume sera pourvu d'un appareil critique discret et précis, de notes documentaires et d'un jeu de tables onomastique, idéologique et chronologique dont il est inutile de soulignerl'exceptionnelintérêt. Le soin en a été confié à M. Pierre Haubtmann, qui travaille depuis une vingtaine d'années à une biographie intellectuelle de P.-J. Proudhon. A l'occasion du cent-cinquantième anniversaire de la naissance du grand penseur social et avec l'agrément des intéressés,nous publions ci-après en « bonnesfeuilles» des extraits des Carnets, précédés de quelqueslignes de présentation. · - la main hélas ! qui frappe de l'épée périra par l'épée. Mon grand-père périt de mort violente : il s'assomma sur la route dans l'hiver de 89, appelée dans son pays l'année du gros verglas, en allant voir sa fille puînée, ma mère, au service dans un village voisin. Elle avait 13 ans, et pleura son père deux ans et demi. Ceci arriva la veille de la Révolution. - Plus tard, ma mère, cuisinière, est remarquée pour ses vertus et ses idées républicaines. Ce que c'est que la noblesse de race. - Je suis noble, moi ! ......... ~ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . 1820. Entrée au collège de Besançon après Pâques, en huitième, par les soins d'un ami de mon père, et sur la p-résentation du curé Sirebon. - Le ·proviseur d' Aubonne s'informe si mon père n'a point été jacobin. Heureusement, il était trop jeune pour eela. 1821 Rien de remarquable pendant toutes ces années que la gêne perpétuelle de ma famille. - Mon père loue sa brasserie : 1822 nous achetons une vache ; nous buvons du jus de groseilles en guise de vin; quand je 1823 ne vais pas en classe, je sarcle les pommes de terre, et je bats à la grange, ou je vais aux champs. - A 14 ans, je lis la Démons1824 tration de l'existence de Dieu, de Fénèlon : depuis lors, je suis resté métaphysicien. 1825. Mission de Besançon : grand fracas, grande dévotion. - Derniers soupirs de la religion en Franche-Comté. A partir de ce moment, ce n'est plus religion; c'est hypocrisie ou bêtise. •

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