D. T. CATTELL communistes pour l'Afrique fussent discutés en tant que tels. Les écrits de Staline lui-même illustrent bien ce point : malgré l'intérêt particulier que leur auteur portait aux « questions nationales et coloniales »., ils ne mentionnent nommément que le Maroc et l'Afrique du Nord 3 • 11 y eut d'autres preuves de l'indifférence de l'URSS à l'égard de l'Afrique. Bien que le régime bolchévique se fût empressé de mettre sur pied à Moscou une « Université pour les travailleurs de l'Est », destinée à servir de Mecque et de centre d'endoctrinement pour les communistes asiatiques, il n'avait de toute évidence pas songé à ouvrir cette institution aux Africains ou à leur assurer des facilités analogues. En fait seuls une vingtaine d'étudiants africains se rendirent à Moscou pour endoctrinement où, en l'absence de toute école africaine spéciale, ils furent admis à l' « 11niversité » asiatique. Un nombre encore plus restreint d' Africains travaillaient dans l' organisation du Komintern., tandis que quelques représentants africains participaient aux activités de la Conférence internationale des travailleurs noirs., organisation camouflée patronnée par les communistes. Au début, les appels de la propagande communiste s'adressaient principalement à la population noire des États-Unis et étaient centrés sur un programme qui réclamait l'égalité raciale et des droits civiques pour toutes les personnes d'origine. africaine. Mais en 1928 ce programme fut brusquement abandonné par le Komintern au profit d'une nouvelle ligne qui reprenait le concept stalinien d'autodétermination pour l'Afrique, sous forme d'une république africaine indigène. Baptisée « doctrine de la république noire », la nouvelle ligne fut lancée en dépit des objections des communistes africains et rencontra des résistances chez les fidèles du parti., tant noirs que blancs. Le Komintern la confirma néanmoins en 1930 et les communistes africains qui continuaient de s'y opposer furent épurés l'année suivante 4 • A partir de 1934, l'Union soviétique essaya de se prémtinir contre la menace nazie en recherchant des pactes de sécurité collective auprès des démocraties européennes : afin ~e ne pas entraver cette action., le Komintern mit une sourdine à ses efforts sur l'Afrique., pourtant hésitants et inefficaces 5 • A l'exception d'un bref regain pendant l'interlude du pacte germano3. Ibid., vol. IX, p. 323 ; vol. VII, p. 146. 4. George Padmore : Pan-Africaninn or Communism ? Londres 1956, p. 351 ; William Z. Poster : The Negro People in American History, New York 1954, pp. 478 et 557-59 ; Edward Roux : Time Longer than Rope, Londres 1948, p. 264. S· 11 n'y avait pas de partis communistes organisés en Afrique tropicale, et bien qu'on affirmât qu'il en existait un en Afrique du Sud, il ne comptait en 1928 que 400 memb~es dont so seulement mient des Noirs ou des gens de couleur (The Communi1tInternational b,twem Fi/th and Sixth World Congre11e1, 1924-28, Londres 1928, p. 491). • Biblioteca Gino Bianco 333 soviétique (1939-41), cet état de sommeil se poursuivit jusqu'après la fin de la deuxième guerre mondiale. L'évolution d'après guerre APRÈS le conflit, les relations entre l'Union soviétique et ses anciens alliés se dégradant, Moscou, à la recherche de points faibles dans l'armure de l'Occident, se tourna une fois de plus vers les régions coloniales. La guerre avait donné une immense impulsion aux forces du nationalisme, à la fois en Asie et en Afrique : les puissances coloniales y étaient assaillies de demandes pressantes de leurs colonies en quête d'indépendance. L'Union soviétique, par la voix des représentants au conseil de tutelle et à la quatrième commission des Nations 11nies, ne perdait aucune occasion d'appuyer ces revendications afin d'embarrasser les puissances coloniales et d'exacerber leurs rapports avec les peuples coloniaux. Bien que les manœuvres soviétiques à l'O.N.U. aient rencontré un certain succès au regard de leurs objectifs limités, elles n'accrurent pas sensiblement la puissance communiste en Afrique. Les mouvements locaux demeuraient, à quelques exceptions près, faibles et dispersés. L'AfriqueOccidentale Française était l'exception majeure, où les communistes, parce qu'ils faisaient alors partie du gouvernement français et contrôlaient d'importantes forces électorales et syndicales dans la métropole, avaient pu s'allier avec le principal mouvement politique de l'A.-O.F. - le Rassemblement démocratique africain (R.D.A.). Ce dernier rompit toutefois l'alliance en 1950 et l'influence communiste connut un déclin marqué. A peu près à la même époque., le P.C. d'Afrique du Sud, pendant longtemps la plus importante organisation communiste du continent, fut dissout et réduit à la clandestinité, ce qui freina notablement sa propagande et son recrutement. En dépit du fait qu'entre 1950 et 1955 l'URSS eût pris de plus en plus conscience de l'importance de l'Afrique 6 et eût accru ses efforts de propagande dans ce secteur, on reconnaissait encore à Moscou au début de 1956 que - s~on l'expression d'un auteur soviétique - « des partis communistes sont loin d'exister dans toutes les parties de l'Afrique »7 • L'argumentation communiste habituelle explique cette carence par l'absence de base prolétarienne et l'action traî6. L'augmentation du volume des études soviétiques publiées sur l'Afrique en est un signe. Depuis la deuxième guerre mondiale voir : Aggravation de la crise du systbns colonial de l'impirialisme apris la deuxi~me guerre mondial, : bibliographie d'ouvrages recommandis, publié par la Bibliothèque Lénine, Moscou 1955 ; Christopher Bird : « Soviet Ethnographie Research on Africa », Africa Special R port, vol. Il, n°• 9 et 10. 7. 1. Potekhine : « La situation politique en Afrique » in revue l'Orientalinne soviitique, Moscou 1956, n° 1, p. 25. • •
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