Le Contrat Social - anno III - n. 2 - marzo 1959

64 en disponibilité, les journalistes en quête de sensationnel, les visiteurs de Khrouchtchev et autres touristes à tête légère. Les «masses » passives et résignées obéissent sans croire nullement à l'âge d'or qu'annonce depuis si longtemps la doctrine officielle. Mais l'adhésion sincère que l'oligarchie communiste n'obtient pas des sujets soviétiques, elle la gagne singulièrement sous forme d'ersatz dans le monde capitaliste que Khrouchtchev considère comme «moribond » (cf. son discours du 24 février au Kremlin). Le plus extraordinaire à propos de ce congrès ordinaire a été plutôt l'importance que la presse occidentale voulait lui prêter à tout prix, prévoyant ce qui ne devait pas arriver, soulignant les moindres paroles insignifiantes, grossissant servilement les vantardises publicitaires et attentive à recueillir pour la postérité les pires banalités ou les plus fades plaisanteries de Khrouchtchev et consorts. Le congrès n'a même pas jugé utile de renouveler le Comité central ni de s'attarder à l'affaire du << groupe antiparti » 1 , péripéties que guettaient bien à tort les commentateurs avides de spéculer à l'infini sur des dissentiments personnels plus ou moins mal interprétés. En fin de compte, l'innombrable légion bourgeoise occidentale des courtisans et des complaisants reste sur ses frais de courtisanerie et de complaisance envers le régime qui se propose de porter le coup final au « système capitaliste moribond ». LE Communiste, de Moscou, organe « théorique» du Comité central, dépositaire de la pensée transcendantale du Parti, a consacré (n° 2 de février) un long article triomphant à cette attitude obséquieuse de l' « Occident pourri », comme disent les zélateurs du despotisme oriental, sous le titre : Le XXJe congrèsdu parti communisteet la presse mondiale. Ce congrès, écrit l'auteur, « a suscité un intérêt sans précédent de l'opinion publique universelle ». Dès son ouverture, «il a été au centre de l'attention dans la presse de tous les pays». 11 n'existe pas au monde « un organe 1. Lequel groupe n'a jamais existé: une coalition s'était formée au praesidium du Parti en juin 1957 pour évincer Khrouchtchev du Secrétariat, mais ses membres ne partageaient pas pour autant les m€mes idées en politique intérieure ou extérieure. Ils sont amalgamés après coup parce que leur dessein s'est heurté à la volonté collective de la majorité des comités directeurs. Le seul fait de qualifier « antiparti » Molotov, Kaganovitch, Malenkov et Chepilov, anciens secrétaires du Parti; Molotov, Malenkov et Boulganine, anciens présidents du Conseil ; Pervoukhine et Sabourov, anciens membres du Praesidium, - suffit à ridiculiser le pouvoir communiste et à prouver la fragilité de son assurance. Si ce pouvoir actuel se montre capable de mettre Vorochilov, Mikoïan et Khrouchtchev à la retraite sans les discréditer et sans rayer leurs noms des dictionnaires encyclopédiques, on pourra dire alors qu'une ère nouvelle s'ouvre devant l'Union soviétique et ses satellites. En attendant, la façon de traiter le « groupe antiparti » dénote la pérennité du stalinisme, à l'exclusion de la démence sanguinaire de Staline . . BibliotecaGinoBianco LE CONTRAT SOCIAL tant soit peu important qui n'ait fait écho à cet événement historique». En règle générale, « les journaux ont largement éclairé le rapport du camarade Khrouchtchev» ... « et toute la marche des débats, jour par jour ». « Les plus vastes couches de la population ont suivi avec une attention intense les travaux du congrès. » Cela continue ainsi sur dix pages grand in-octavo compactes. «Les opinions des hommes politiques et des publicistes bourgeois reflètent leur sentiment d'anxiété et d'alarme quant aux destins du capitalisme », constate le porte-plume de Khrouchtchev qui, ensuite, résume comme suit « les points principaux sur lesquels tous ou presque tous les commentateurs fixent leur attention, indépendamment de leur position politique ». Ce sont : « - l'immense signification internationale du XXIe congrès ; - l'orientation pacifique du plan septennal; - les succès croissants du socialisme dans la compétition avec le capitalisme ». Après quoi viennent d'abondantes citations de la presse communiste, puis la rubrique du «monde bourgeois inquiet>> où le journal communiste Libération, censé capitaliste, compare le plan septennal soviétique à une « fusée à sept étages». Mais les références à maintes gazettes bourgeoises, amé- • • r1cames et autres, ne manquent pas pour attester les << réalisations énormes » et les «possibilités potentielles >>encore plus énormes du « nouvel ordre social ». Le New York Times du 8 février, notamment, aurait vu dans le plan septennal le « défi d'un spoutnik économique ». Le Communiste fait grand état de dizaines parmi les principaux journaux étrangers pour exalter les « succès colossaux, matériels, scientifiques et culturels>> du peuple soviétique, qui suscitent tantôt l'admiration, tantôt l'inquiétude dans le monde, voire l' « alarme des cercles impérialistes ». Il utilise avec astuce les propos inconsidérés, les conclusions imprudentes des « observateurs >>occidentaux les moins compétents pour ressasser les thèmes principaux de la propagande communiste actuelle : le prétendu «défi» économique du plan septennal au système capitaliste et les réussites techniques en matière de satellites artificiels et de fusées qui attesteraient la supériorité du régime soviétique sur tout autre. Le New York Times est encore invoqué pour avoir prédit que « l'élévation marquée du niveau de vie en URSS accroîtra l'attraction politique du système communiste non seulement sur les pays arriérés, mais sur les pays relativement pauvres de l'Europe occidentale comme l'Italie ». Ce sont en effet les arguments de cette sorte qui deviennent monnaie courante et qui désarment insidieusement t?u~e résis\an_c,ei.ntellectuelle ou morale à l'impérialisme sov1et1que, donnant cause gagnée à Moscou et à Pékin dans une « compétition » imaginaire entre « le socialisme et le capitalisme». Après cette longue mixture où alternent les superlatifs aussi démesurés qu'insincères de la presse communiste, progressiste, arabique, et les poncifs ou les « aveux » puisés aux sources les

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