Le Contrat Social - anno III - n. 2 - marzo 1959

114 contemporaine (p. 27). Mais sans doute M. Monteil, qui n'en est pas à une palinodie près, conçoit-il aisément l'esclavage dans le respect de la personne humaine. Tout l'ouvrage est dans ce style, et s'exprime par formules alambiquées, d'une obscurité nuancée, mutuellement contradictoires, ou par assertions tranchées qui sont autant de contre-vérités. Quelques exemples: « L'arabe est une langue de civilisation, de culture scientifique, nominaliste et dénationalisante (rôle que joue aussi, pour d'autres raisons, le français). Mais la formation pédagogique n'est pas facilitée par la diglossie : le peuple ne parle pas la langue savante, mais use de dialectes variés » (p. 13). • 11 aurait été trop simple de dire (abstraction faite de l'incidente hermétique concernant le français) : « L'arabe fut autrefois une langue de culture internationale, mais non point nationale ; elle est à peu près morte aujourd'hui, puisque le peuple ne parle guère que des dialectes aberrants. » Ou encore (p. 51) : « Depuis 1300 ans, l'Islâm a canoniquement respecté les pèlerinages chrétiens de Palestine ... ». La prédication de la première Croisade, dont l'objet immédiat était la protection des lieux saints menacés par les musulmans, fut donc un acte d'agression non provoquée? Pour parer à cette objection, l'auteur emploie d'une façon cryptique l'adverbe «canoniquement» ; il faut lire : << L'Islâm, en théorie mais pas nécessairement en pratique, a respecté... etc. ». Et ainsi de suite. Certaines bévues de M. Monteil sont plus réjouissantes : « Chaque année, depuis 13 siècles, plus de cent mille musulmans se rendent au pèlerinage [de la Mecque] par mer (...)par avion ou par voie de terre ... » (p. 23). Depuis 13 siècles, par avion? Ayant avoué dès le début que l'objet de son étude n'avait pas de véritable existence(« Même en Arabie, il n'y a pas ... de race arabe... Les États du Levant ne sont pas « arabes »... L'Égypte est, ethniquement, copte... le Maghreb est berbère »... etc., pp. 6-7), l'auteur nous promène à travers les provinces très diverses d'un « ensemble hétérogène » qui s'il n'est pas arabe est fatalement destiné à le devenir (on ne sait pas pourquoi, ou on ne le sait que trop). Le chapitre premier, « L'Arabie », nous révèle un chaos, un désert à pétrole, où bat le cœur même de l'Islam. Le chapitre II est consacré au « Croissant fertile » du Levant, selon l'expression peu heureuse de l'égyptologue américain Breasted (qui l'appliquait d'ailleurs à autre chose). C'est une antiphrase, puisque les vastes territ~ires du Levant sont en majorité infertiles et ne sont pas disposés en forme de croissant. Mais passons. Au milieu d'un fatras de renseignements inexacts, périmés ou tendancieux, on nous révèle (p. 43) Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL que « L' Irâq est le pôle du ''pan-arabisme'' »- ce qui sera peut-être vrai bientôt, si Moscou en décide ainsi, mais n'était certainement pas vrai en 1957. Le chapitre III s'intitule pudiquement : « L'affaire de Palestine », car M. Montel ne reconnaît pas l'existence d'Israël. Il faut pourtant qu'il en parle, mais ce qu'il en dit est presque toujours erroné, et le plus souvent mensonger. La « guerre de Palestine » commence par les « attentats méthodiques des Sionistes contre les paysans arabes » (p. 47) et finit par l'« attaque israélienne sur Gaza ... » (p. 48) que rien ne provoqua (cf. p. 64, où Nasser a bien raison de se procurer chez les Soviets « des armements de protection contre Israël»). Même dans les détails plus anodins, on ne fournit au lecteur que des précisions fa4sses : ainsi, les « Juifs, rapatriés (... ) même d'Ethiopie : les Falasha » (p. 46) n'existent que dans l'imagination de l'auteµr : il n'y a eu à ce jour aucune immigration d'Ethiopie en Israël. ,. En revanche, le chapitre IV, sur l'Egypte, est plein de tendresse pour ce que M. Monteil dénon1me d'une façon cocasse « la Révolution de Juillet» (il s'agit du 23 juillet 1952) et surtout pour Nasser. Celui-ci ne songe qu'à la réforme agraire ; s'il se pose aussi « en champion de !'arabisme », c'est bien compréhensible puisque cela équivaut à soutenir « pour les peuples dépendants (notamment en Afrique du Nord française), le principe de l'autodétermination » (pp. 63-64). Car c'est là que le bât le blesse : dans les chapitres VII- IX, consacrés à la Tunisie, à l'Algérie et au Maroc, M. Monteil plaide, d'une façon parfois enveloppée, l'abandon à !'arabisme de ces terres ... qui ne sont pas arabes. « Traditionnellement amie des Arabes et de l'Islâm ... » (depuis quand?) la France, en démissionnant, mettrait fin au « drame algérien » et « retrouverait, sur le plan politique, économique et moral, la contrepartie de ses privilèges devenus caducs. C'est ainsi qu'une fois de plus, la justice prêterait ses voies à la grandeur» (pp. 108-110). Et vqilà pourquoi votre fille est muette. Comment ne le serait-elle pas, d'ailleurs, puisque les Presses Universitaires dites de France en sont à publier les thèses du Caire et de Moscou? A.-G. HORON L'Italie au XVIIIe siècle LUIGI11ALPANE: Storia del lavoroin Italia dagli inizi del secolo XVIII al 1815. Milan, Dott. A. Giuffrè éd., 1958, xx-629 pp., 20 pl. CE GROSVOLUMEest la seconde édition, augmentée et illustrée, d'un ouvrage publié d'abord en 1944, et qui constitue le tome IV d'une Histoire du travail en Italie dirigée par M. Amintore Fanfani. L'auteur rassemble, en treize chapitres,

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