110 nétaire depuis le milieu du x1xe siècle; le second Marx und die Gegenwart, retrace les conception~ de Marx en les soumettant à la critique des faits. Les deux sont trop riches pour qu'il soit possible dans un bref aperçu, d'en faire une analys; exhaustive. On ne peut qu'en recommander la le~re en se bornant à y relever ce qui semble essentiel pour la compréhension de la situation présente et pour les problèmes de doctrine. F. Sternberg indique pourquoi les lois et les tendances prêtées par Marx à son capitalisme « p~r » n' ?nt jamais joué l?l~inement dans le capitalisme reel auquel le milieu non capitaliste du monde entier fournissait largement de quoi amortir ses contradictions internes. 11 montre c?m!ll~nt le capitali~m~ américain a pris un chemin s1 d1:fefrent du cap1tal1sme européen, dont Marx n'avait connu et étudié que la forme anglaise, la plus ancienne. 11 souligne que, contrairement à ce ~u~ Marx et s,es disciples. avaient prévu, le capitalisme des metropoles, lom de favoriser le développement de l'industrialisme capitaliste dans les colonies, l'a au contraire freiné, de sorte que la polarisation de la société en deux classes de plus en plu~ irréductiblement opposées ne s'est accomplie n1 en Europe, ni en Amérique, ni dans les colonies et autres régions dépendantes d' outre-mer 4 • La classe ouvrière proprement dite n'est devenue nulle part la majorité de la société. Les classes moyennes d'aujourd'hui n'ont plus rien de commun avec celles de jadis, mais tout en étant co~posée_s esse?tiell~~ent de salariés (souvent moins bien remuneres que les ouvriers manuels), elles sont si différenciées et hiérarchisées qu'il paraît difficile de parler d'une « classe prolétarienne » homogène, prête à se lancer à l'~ssa_ut de la forteresse capitaliste, d'autant plus difficile que les Etats-Unis sont en train de liqui- ~er compl~tement le paupérisme et que l'Europe libre, quoique avec un retard compréhensible (conséquences de deux guerres) prend le même chemin. D'autre part, la dernière crise, si exceptionnellement longue et profonde, de 1929-1938 n'est pas près de se répéter. ' Bien qu'insistant sur le rôle croissant de l'État dans l'économie et sur ses possibilités d'influencer le cycle de la conjoncture, Sternberg se garde bien de prédire à l'économie américaine et ouest-européen_n~.u,n avenir sa1;s c~ises. S'il croit que les possibilites de les prevenir, ou du moins de les amortir, se sont accrues, il redoute que les interventions de l'État ne se produisent trop tard, et il énumère pl~sieurs éléments susceptibles d'aggraver une crise future. Sternberg voit dans le New Deal de 1933 le fait décisif qui a imprimé des tendances nouvelles 4. Sternberg reprend ici, en l'élargissant très considérablem~nt - les faits n~~veaux et sa propre maturité acquise depws trente ans fac1btant sa tâche - la démonstration ébauchée dans son premier ouvrage, Der Imperialismus, publié en 1926. BibliotecaGinoBianco DÉBATS ET RECHERCHES . à l'économie américaine. En se fondant sur ces « modifications de structure », il estime que les lois énoncées par Marx ne jouent plus aujourd'hui, si tant est qu'elles aient jamais joué intégralement. Mais il ne franchit pas le pas essentiel, il ne se demande pas si les changements structuraux intervenus : rôle déterminant de l'État, influence accrue des syndicats, évanouissement définitif du « laissez faire », atténuation des antagortismes de classes, garanties de plus en plus substantielles contre le chômage, limitation de la puissance du gros capital, si tous ces changements permettent encore d'appeler « capitaliste » une économie aussi éloignée de tout ce qui faisait l'essence du capitalisme voici quarante ans encore 5 • Il affirme en tout cas, et à plusieurs reprises, que les ÉtatsUnis sont aujourd'hui « plus proches d'une transformation socialiste qu'au début du siècle ». IL N'EST pas étonnant que des ouvrages aussi denses et d'une telle ampleur contiennent quelques contradictions. C'est ainsi que l'auteur regrette que les puissances occupantes en Allemagne, et notamment le. gouvernement anglais dans sa zone, n'aient pas procédé, au lendemain de la guerre, à la socialisation de l'industrie lourde de la ~uhr et qu'elles aient ainsi empêché la chute de Hitler de se transformer en « révolu- !ion sociale » ( Conflit du siècle, pp. 626-627) ; mais il ne se demande p·as si des industries ruinées se pr~tent à un~ socialisation quelconque. D'autre part, il reconnait (Marx und die Gegenwart, p. 236) en se fondant sur l'expérience acquise depuis 1~ fin de la g~erre, qu~ « la socialisation des moyens de pr?duction ne resout pas des questions aussi essentielles que le rapport entre le travailleur et son travail .... et que par conséquent, le socialisme démocratique étant axé sur l'homme, il importe de trouver des formes nouvelles » 6 • Enfin il souligne lui-même (ÇJonflit du siècle, pp. 634 et 649; Marx und die Gegenwart, pp. 250-251) qu'une transformation socialiste n'a chance de se ~é311iser9.u'à l'échell~ d'une Europe unie, les entites. _nationales de 1 Europe étant devenues trop petites pour se prêter à des réformes de grande envergure. Dans ce domaine, Sternberg néglige complètement les travaux des théoriciens marxistes qui ont _apporté des contributions on ne peut plus précieuses à la théorie de la socialisation (Kautsky Bauer, Renner), de même qu'il passe sous silenc~ les. analyses de Renner relatives à la structure sociale c?ntemporaine. La d~~crip~on magistrale que Sternberg donne de la hierarchie sociale présente aux États-Unis est une illustration frappante 5. On constate les mêmes hésitations et imprécisions dans le programme des socialistes autrichiens, adopté en mai 1958. ?· . On ~ou~e ~ne idée. semblable dans le programme des socialistes au~1~hiens, ,~u1 ne V?it dans l'étatisation qu'une mes~re tra~s1to1re~ qu 11 faudrait surmonter en substituant une 1mpuls1on vraiment collective aux organes de l'État.
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