P.BARTON en classant l'ouvrier dans une catégorie supérieure à sa qualification professionnelle 6 , tantôt en allouant à chaque opération des temps permettant d'acco~l'lir, avec un rendement moyen, 170 ou 180 % de la «norme» 7 • Aux chemins de fer, les «normes» sont souvent exécutées à 190 ou à 200 % alors que les objectifs du programme ne sont pas atteints. 8 En général, on estime la part du salaire tarifaire dans la paie effective à quelque 40 à 55 °/o. 9 Dans bien des industries qui pratiquent le salaire au rendement avec échelle progressive - le prix à la pièce étant majoré à mesure du dépassement de la « norme » - les coefficients de majoration sont si nombreux que le calcul de la paie est devenu une affaire théoriquement très compliquée et arbitraire dans la pratique. 10 Bien que l'éventail des salaires soit extrêmement ouvert, il arrive souvent que des manœuvres ou des « S. O. » gagnent plus que des professionnels. On constate à l'intérieur d'une même usine ou d'un même atelier des inégalités absurdes. Ainsi, en 1957, les faits suivants ont été observés. dans l'usine métallurgique de Léningrad : la paie est considérablement plus élevée pour les travailleurs manuels que pour ceux qui utilisent les machines-outils ; dans l'atelier n ° I de cette usine, le gain des monteurs de quatrième classe est de 40 % supérieur à celui des tourneurs de la même classe tarifaire ; dans la cinquième classe, la différence correspondante s'élève à près de 50 %; les serruriers de troisième classe réalisent les «normes» à 274 % et ceux de cinquième classe, à 353 o/o. Des faits analogues apparaissent dans l'entreprise Lvovselmach : à la section forges et presses, lei, forgerons de · troisième et quatrième classes, fabriq11aot les roues, exécutent les « normes » à 350 ou 400 % et gagnent de 1.500 à 1.600 roubles par mois, alors que ceux de sixième et septième classes, accomplissant des travaux sensiblement plus qualifiés, ne sont payés que 800 à 1.100 roubles par mois puisqu'ils réalisent les « normes » à 180 ou 200 %; de même, les presseurs de troisième classe gagnent 1.600 roubles, alors que ceux d'une catégorie de deux degrés plus élevée ne touchent qu'entre 600 et 800 roubles. Dans d'autres cas, les ouvriers accomplissant le même effort dans les mêmes conditions de travail exécutent les normes à 300 % et plus ; etc. Lorsqu'on examine des cas individuels, au lieu de s'en tenir aux moyennes, le chaos régnant dans les « normes » - et l'injustice qui en découle - saute encore plus aux yeux. Ainsi, en janvier et février 1957, dans la menuiserie de l'usine de machines agricoles de Krasnoïarsk, 6. Swi1t1kië pro/1orouzy, 1956, n° 8. 7. Troud, 8 et 11 juin 1954. 8. Mo1koo1kara Pravda, 22 novembre 1956. 9. Sooiet1ki, pro/1orouzy, 1956, n° 8. IO. Ibid. Biblioteca Gino Bianco 349 les « normes » étaient exécutées en moyenne à 156 à et 150 %, mais à 100 et 102 % seulement dans un des secteurs de cet atelier, alors que quatorze ouvriers employés au rivetage des planchettes et des rondelles atteignaient systématiquement 60 ou 70 % de la « norme ». u Si la désorganisation due aux mesures officielles est particulièrement frappante à propos des salaires, elle ne se limite nullement à ce seul domaine. Tous les autres aspects des rapports de travail se présentent sous un jour analogue. On peut mentionner par exemple la réglementation relative à la sécurité et l'hygiène du travail. En URSS, cette activité est encore plus importante pour la marche ·régulière des usines que dans les vieux pays industriels. Car une bonne partie du prolétariat soviétique se compose de paysans fraîchement recrutés par l'industrie et leur contact avec le . machinisme constitue une véritable aventure. Impossible de dire ce qui, de la peur ou de la curiosité, l'emporte chez ces novices ; pour la sécurité, l'une est aussi dangereuse que l'autre. Au demeurant, les occasions d'acquérir une culture technique générale avant d'apprendre un métier sont très limitées, en raison du bas niveau de vie, même pour les citadins. Aussi les ouvriers industriels à la seconde génération sont-ils presque autant exposés aux accidents que ceux d'origine rurale. A cela s'ajoute l'obligation pour les directeurs d'usine d'atteindre à tout prix, sous peine de démêlés avec le Parti et même la police, les objectifs du plan. Du fait des d1fficultés chroniques d'approvisionnement, cette tyrannie pianiste pousse les chefs d'entreprise à dépenser à d'autres fins les ressources destinées à la sécurité et l'hygiène du travail. En outre, ils doivent livrer, à l'approche de chaque échéance de véritables batailles de production ( chtourmovchtchina), au cours desquelles la durée du travail devient illimitée et où l'on passe outre aux règles élémentaires de sécurité. Malgré l'imporrance particulière de la réglementation, c'est, ici encore, le chaos qui règne. D'abord, le pouvoir de réglemer1tation est partagé par de nombreuses autorités dont les compétences respectives ne sont pas nettement délimitées : le Conseil central des syndicats, les comités directeurs des fédérations d'industrie conjointement avec les ministères correspondants, le ministère de la Santé publique, l'Inspection sanitaire d'État, le Comité d'État pour le bâtiment, etc. Les prescriptions édictées par des organes aussi divers ne sont même pas enregistrées auprès d'une seule direction. D'autre part, d'im~ortants aspects du problème font l'objet de prescnptions visiblement dépassées par l'évolution de la technique. Par exemple, les arrêtés du 13 avril 1925 et du 11 février 1926 11. V. Chourouev : • Observer strictement la nouvelle proc~dure de r~vision des normes de r ndcment •, dans Sotnali1titcheski troud, 1957, n° 12.
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