182 te1nent de ses professeurs. Ajoutons que sur ce point se marque de plus en plus un relâchement scandaleux, et généralement pour des raisons financières assez sordides. Mais cela est un autre problème. Ce qui prouve que la neutralité de l' enseigne1nent philosophique a été, en gros, respectée, c'est que l'on n'a,jusqu'à ce jour, jamais observé de conversions en bloc dans nos Facultés ou dans nos lycées. On serait bien en peine de signaler un professeur bergsonien dont tous les élèves sont restés bergsoniens, des professeurs chrétiens qui ont /ait baptiser les deux tiers des athées de leurs classes. Je n'ai pas, non plus, entendu parler de professeurs radicaux ou socialistes qui ai'ent recruté massivement parmi leurs élèves. Il en est tout autrement quand nous avons affaire à un professeur de philosophie communiste. D'abord, alors qu'il n'y a pas de solution catholique ou protestante pour tous les problèmes de la logique, des sciences, de la psychologie ou même de la morale, il y a une prétendue solution marxiste pour tous les problèmes, même apparemment les plus éloignés de la politique, et, pendant neuf heures par semaine, les élèves voient toutes les questions exposées dans les concepts de la soi-disant « dialectique » historique, et résolues en fonction de la . politique du Parti. On peut constater en second lieu qu'à part Karl Marx (et quelquefois un Descartes de fantaisie, Kant et Hegel), aucun auteur n'a été expliqué ni par/ ois même signalé aux élèves des communistes, qui sont de ce fait d'une inculture inimaginable et ne peuvent confronter la doctrine de leur prof esseur à la pensée des grands auteurs, susceptible de lui faire contrepoids. Enfin, alors que la plupart des professeurs de philosophie s'efforcent d'éviter de prendre parti dans les querelles de politique actuelle, les marxistes font une propagande non seulement pour le marxisme théorique mais en faveur de la politique et du régime de l'URSS, contre la France et la politique française, n'hésitant pas à reproduire les mensonges les plus grossiers de la presse communiste. On comprendra donc que, pour peu que le professeur marxiste soit jeune, sympathique et actif (ce qui est souvent le cas), les deux tiers d'une classe de philosophie s'inscrivent en fin d'année au parti communiste. Ce fait est fréquent. Il est grave. Ce n'est peut-être pas encore le plus grave. En effet, même si elle ne provoque pas une adhésion au Parti, la propagande marxiste impose à tous, même à ceux qui lui sont hostiles, un matériel conceptuel qui tend à leur donner une vision du monde identique à celle de leurs adversaires : on pense dorénavant en Jonction des notions de progrès, de dialectique, de sens de l'histoire, de lutte de classes, etc., comme si ces concepts étaient scientifiques et désignaient des réalités expérimentales au même titre que la température, la masse ou la pression. Admettre comme allant de soi ces concepts, dans lesquels les marxistes ont souvent toutes les peines du monde à faire ~ntrer les faits historiques même préalablement remanipulés, c'est admettre l'essentiel du marxisme et c'est s'interdire de di"scuter victorieusement avec lui. Notons encore qu'il reste toujours quelque chose des faits faux et encore plus des faits vrais, mais soigneusement sélectionnés, que les marxistes rapportent à leurs élèves. Enfin j'ai remarqué que les communistes ont tendance pour asseoir leur popularité à flatter leurs élèves : la classe en général et les élèves « marxistes» en particulier. Les êtres jeunes ne résistent pas plus que les adultes à ce genre de démagogie : à ces félicitations constantes, à cette main tendue, à ces paroles encourageantes qui leur promettent une place de choix dans la société de l'avenir. Dans ces conditions, il serait peut-être urgent de rappeler aux socialistes et aux radicaux que ce n'est pas l'école libre qui constitue un danger pour la laïcité, mais l'existence d'un enseignement communiste au sein de l'école laïque. BibliotecaGinoBianco LE CONTRAT SOCIAL Que Jaire contre ce danger qui risque de submerger la France aussi efficacement qu'une invasion russe, si nous n'y prenons garde? Péguy affirmait que lorsque l'état d'esprit des professeurs de l'École normale de son temps serait devenu celui de la totalité des professeurs français, les Allemands seraient à Suresnes; et nous les y avons vus. On peut dire, tout aussi bien, que quand tous les professeurs de philosophie français seront communistes, les Russes ne seront pas loin de Suresnes. Il ne suffit pas de répondre qu'il reste, Dieu merci, encore beaucoup de philosophes non marxistes. Ils n'ont pas la puissance d'entraînement démagogique des communistes, la raison est désarmée devant la passion. Au reste ces professeurs travaillent à leur disparition en recevant aux examens les candidats «marxistes», soit pour ne pas pénaliser les jeunes gens à cause des idées de leurs maîtres, soit par un scrupule de libéralisme que ne partagent pas leurs adversaires. Les jeux sont faussés. Il faut reconnaître que les mesures à prendre sont délicates. Il ne suffirait pas d'interdire aux professeurs de philosophie d'adhérer à un parti politique, car les professeurs marxistes donneront leur démission du parti communiste pour continuer une besogne de propagande beaucoup plus efficace que toute autre et, de plus, payée par le gouvernement à la destruction duquel elle concourt. Il faudrait donc commencer par interdire à tout professeur, actuellement inscrit au parti communiste, l'enseignement de la philosophie et cela pour le restant de sa carrière. Il faudrait organiser ensuite des inspections générales fréquentes et sévères pour dépister les crypta-communistes. Il y aurait sans doute encore d'autres mesures à étudier. . On objectera que ces mesures constituent une atteinte à la liberté de pensée. Elles me paraissent au contraire la seule défense possible de cette liberté, car le « marxisme » actuel impose sa doctrine en URSS et en France même par des moyens qui n'ont aucun rapport avec ceux qui sont employés pour former le jugement personnel. Au reste, est-ce une atteinte à la liberté que de ne pas donner dans une armée les postes de commandement et d'instruction militaire aux espions étrangers ? Qu'un État se défende contre ceux qui veulent le détruire a toujours paru légitime à ces ennemis eux-mêmes. Seule la République française entretient son ennemi, bien plus, favorise son expansion au nom d'un libéralisme dont le communisme se moque, qu'i'l récuse comme fin, qu'il méprise dans ses moyens. J. P ARAIN-VIAL LA LETTRE de notre correspondante répond vraiment aux préoccupations anxieuses de tous ceux qui ont conscience du danger communiste en France, infiltré de plus en plus dans l'Université comme dans toutes les institutions de l'État. Elle met en cause le a marxisme », mais nous· comprenons sous ce vocable en réalité le stalinisme, car les agissements funestes qu'elle dénonce à si juste titre datent de Staline : jamais on ne les a constatés au temps où les socialistes se réclamaient de Marx, ni même alors que les communistes s'inspiraient de Lénine. Le mal prend des proportions alarmantes, intolérables, en raison de l'inertie gouvernementale depuis la ~erre, de la carence ou de l'indolence des partis qui devraient défendre les valeurs traditionnelles, de la complicité des journaux et groupements à étiquettes progressistes ou libérales, enfin du laisser aller général dans les démocraties occidentales, plus accentué en France que partout ailleurs. Il faut souhaiter que la lettre de Mme Parain-Vial suscite d'autres initiatives du mêm(?ordre, jusqu'à détermirier un courant d'opinion salutaire. Si les mesures pratiques suggérées prêtent à controverse, notre revue accueillera volontiers l'expression d'idées divergentes.
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