126 oubliées par les politiciens qui, à l'époque, ne surent ni s'entendre avec le nouvel État, ni le combattre de manière sérieuse. Dès 1922, Lloyd George prenait l'initiative de la conférence de Gênes, la première de ces foires diplomatiques contemporaines, tapageuses et stériles, donc nuisibles, que l'on appelle à présent« conférences au sommet». Tchitchérine et Rathen.au en profitèrent pour conclure le traité de Rapallo, au grand désarroi des ministres de !'Entente, et Lloyd George qui se croyait très astucieux resta le dindon de la farce. Son fâcheux exemple et le fiasco de sa conférence n'ont servi de rien à ses successeurs, travaillistes ou conservateurs, qui s'obstinent à spéculer sur des conférences analogues au bénéfice exclusif des communistes, les seuls à savoir ce qu'ils veulent et à le vouloir avec persévérance, les seuls aussi à mettre en œuvre les moyens appropriés à leurs fins. Depuis Gênes, les contacts et les rapports se sont multipliés entre le pouvoir soviétique et le monde extérieur. Toutes les nations ont reconnu de facto, puis de jure le nouveau régime et ont envoyé à Moscou leurs ambassadeurs, ministres et consuls. Dans toutes les capitales, il y a des représentations diplomatiques, commerciales et pseudo-culturelles de l'Union soviétique. Il y a aussi des délégations communistes aux Nations Unies, comme il y en eut une à la Société des Nations. Où donc est le refus de discuter? On a au contraire trop parlé, mais précisément pas un langage que les communistes soient capables de comprendre. Successivement Mustapha Kemal, Mussolini et Hitler avaient, en peu d'heures et encore moins de paroles, traité avec Moscou à leur satisfaction commune. Pour s'en tenir aux Américains et aux quinze dernières années, il est constant que depuis les conversations de Téhéran entre Roosevelt et Staline, trois présidents des États-Unis et six secrétaires d'État ont négocié avec le gouvernement soviétique en dix-neuf circonstances et ont conclu quarante accords sur lesquels trentesept sont considérés à Moscou comme chiffons de papier. Qui donc ose parler d'un refus de discuter? « La morale communiste se fonde sur la lutte pour le renforcement et la réalisation du communisme », a dit Lénine, interprété en ces termes sous Staline : « Du point de vue communiste n'est moral que ce qui contribue à anéantir l'ancien monde d'exploitation et consolide le nouveau systèm~socialiste » (Dictionnaire philosophique, Moscou, 1952). On ne saurait exiger des tenants de tels principes le respect des engagements pris, mais il faut savoir avec qui l'on discute, avec qui l'on ne refuse pas de BibliotecaGinoBianco LE CONTRAT SOCIAL discuter. Il faudrait savoir aussi comment on devrait prendre part à ce genre de discussions, tant «au sommet » qu'à la base. En 1950, la Commission des affaires étrangères de . la Chambre des représentants à Washington s'est livrée à une enquête consciencieuse sur la conduite des dirigeants soviétiques dans les affaires internationales. Son rapport, Background Information on the Soviet Union in International Relations, n'est qu'une longue nomenclature des violations de contrats dont, à cette date, les maîtres de l'Union soviétique s'étaient rendus coupables. Un représentant démocrate, Louis B. Heller, de Brooklyn, a fait consigner au CongressionalRecord du 7 juin 1951 une série d'observations pertinentes, dans le même sens. Sous le titre «Accords, pactes et traités violés par l'URSS, faits et références », on peut lire dans le Bulletin de l'Association d'Études et d' Informations internationales (n° 59 de janvier 1952) un résumé saisissant de ces reniements de la signature communiste. Plus récemment, en 1955, une étude bien documentée de la sous-commission sénatoriale pour la Sécurité intérieure, à Washington, portant sur un millier de traités conclus par Moscou, prouvait que le gouvernement soviétique « a violé sa parole envers tout pays auquel il avait donné une promesse signée». Une nouvelle conférence «au sommet » ou ailleurs ne pourra qu'allonger la liste. En effet, les dirigeants soviétiques n'ont aucune raison de renoncer à la moindre de leurs conquêtes, de leurs ambitions ni de leurs manœuvres. Ils 0nt au contraire maintes raisons de se croire dans la bonne voie conduisant à la domination de la planète. Toutes les complaisances, les concessions obtenues en Occident - et en Orient - les confirment dans cette certitude : ils appellent cela le sens de l'histoire. · Les multiples déclarations que corroborent les actes des successeurs de Staline affirment la même volonté de puissance, un impérialisme que rien ne limite, sauf le risque d'une guerre impliquant du danger pour leur régime. A quoi il est vain d'opposer des sermons, des gages de bonne volonté, un esprit de conciliation qui sont nécessairement interprétés comme des signes évidents de décadence irrémédiable. La seule façon d'inciter les communistes à réviser leurs théories conquérantes et leurs pratiques .malhonnêtes serait de leur opposer une résolution laconique de n'accepter les unes ni subir les autres, tout en réfutant sobrement leurs sophismes, en dénonçant froidement leurs turpitudes, devant cette opinion publique proclamée souveraine mais abandonnée jusqu'à présent
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