• N. IASNY Pouvoir. La toute première résolution du Parti sur l'agriculture après la mort de Staline, celle de la réunion plénière du Comité central du 7 septembre 1953, proclamait : « Ce serait une erreur de croire que l'essor de l'agriculture se fera par samotiok. » En conséquence, pour toutes les MT S (stations des tracteurs et machines) et leurs kolkhozes, des groupes de travailleurs devaient être organisés au comité de district du Parti avec, à leur tête, un secrétaire spécial, afin de diriger les MTS et chaque kolkhoze. La même mesure était préconisée - avec beaucoup de vigueur - dans la résolution d'une réunion plénière du Parti, le 24 mars 1954. De larges pouvoirs d'organisation et d'autorité sur le travail des MTS et des kolkhozes furent conférés à l'organisation de district du Parti, les MTS recevant de leur côté des pouvoirs étendus sur les mêmes kolkhozes. Elles devaient participer à l'élaboration des plans opérationnels de leurs kolkhozes et furent rendues responsables de l'accomplissement par ceux-ci de leurs obligations envers l'État. Pour fournir le personnel nécessaire aux organisations de districts, un grand nombre de travailleurs (pour la plupart membres du Parti) furent envoyés des villes dans les régions rurales. Khrouchtchev avait proposé l'envoi de 50 000 fonctionnaires ; plus· de 20 000 sèmblent être partis en fait. - Initiative des kolkhoziens. Le grand relèvement de l'agriculture après les dégâts de la collectivisation au début des années 1930 fut en grande partie atteint, notamment pour les pommes de terre, les légumes et les produits de l'élevage, par les petites exploitations privées des kolkhoziens. Par contraste, le relèvement d'après Staline devait se fonder sur l'économie socialisée. La lutte contre les exploitations individuelles des kolkhoziens avait commencé dès 1938, sitôt que l'agriculture s'était plus ou moins rétablie au-dessus du niveau de famine des années 1932 et 1933. Elle ne cessa jamais complètement, même pendant la guerre, et fut activée ensuite. Jusqu'à la mort de Staline la production privée des kolkhoziens n'atteignit jamais son niveau d'avant-guerre et reste sans doute encore au-dessous, de nos jours. L'attitude actuelle du Parti à l'égard de l'économie privée des kolkhoziens fut clairement révélée par le décret sur « le statut de l'artel agricole et le développement de l'initiative des kolkhoziens dans l'organisation de la production des kolkhozes et la gestion des affaires de l'artel» publié le IO mars 1956. Quel cynisme de parler Biblioteca Gino Bianco 155 de l'initiative des kolkhoziens après avoir insisté pendant des mois sur l'autorité du Parti et des MTS et avoir condamné nettement le samotiok ! Cynisme d'autant plus grand que le décret parle du développement de l'initiative des kolkhoziens, comme si jusqu'à présent ... Dans ce texte, les kolkhoziens étaient invités à montrer de l'initiative en augmentant le nombre minimum de journées de travail dues à leurs kolkhozes, et en réduisant la superficie des parcelles individuelles et le nombre de têtes de bétail qu'ils ont le droit d'entretenir ou de posséder. Le ministre des Finances eut soin de réduire dans le budget de 1957 les rentrées escomptées de la taxe agricole << en relation avec le changement de dimension des parcelles attribuées aux kolkhoziens [autre cynisme] conformément aux décisions des réunions plénières des kolkhozes >> 2 • Les efforts pour réduire l'importance des exploitations individuelles des kolkhoziens s'expliquent par l'expansion des kolkhozes et l'augmentation des répartitions qu'ils font à leurs membres. Mais outre que beaucoup d'entre eux distribuent toujours très peu, même les paysans des kolkhozes prospères ont besoin d'exploitations personnelles comme assurance contre les mauvaises récoltes des kolkhozes qui, comme nous l'avons déjà expliqué, atteignent tout particulièrement les kolkhoziens à cause du système extrêmement injuste de paiement par l'État des prestations agricoles. . Par décret du 4 juillet 1957, les livraisons obligatoires par les paysans et les salariés, déjà réduites en 1953, furent entièrement abolies. Cette mesure représentait essentiellement une gratification offerte à l'occasion du détrônement de Molotov et compagnie. Elle accroît l'intérêt qu'a le Parti de réduire l'économie paysanne individuelle, pour finir par la supprimer. Échanges de produits et marchés kolkhoziens. La dernière œuvre de Staline fut sa brochure Les problèmes économiques du socialisme en URSS (Bolchévik, septembre 1952). Staline y préconisait un système qu'il appelait cc l'échange des produits >> et qui devait constituer un pas important vers le communisme : les kolkhozes, au lieu d'écouler leur production sur les marchés kolkhoziens, la livreraient à l'État en échange de biens de consommation qu'ils répartiraient ensuite en nature entre leurs membres selon des modalités non précisées. Depuis la mort de Staline, on n'a plus entendu parler de ce système baroque. Mais l'idée a été 2. Économie Planifiée, 1957, n 3 p. 28.
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==