\ .. \ ~ . • ...\·•:~ .. ~ l ,. •· ' .. ....CHRONIQUE • : . Autre po.int d'histoire . . \ LB. COMMENTAIRE de M. George Katkov traitan~ du document von Kühlman relatif à des subsides . . . allemands versés aux bolchéviks en 1917 (cf. Un Point d'histof,re, dans notre précédent numéro) fait allusion, en _· pas~_ant, au· voyage des « leaders polchéviks » à tr~vers l'Allemagne dans un « train scellé >t. • Ce fallleux épisode a fait couler autant ~~encre que l'a~~ation d'être~ la solde du Kaiser, examinée ici-mêqie. Mais l'épisode est aussi. fameux que .déformé ; une m~se au point ne .sera pas inutile ~ors que des publications tapageuses abusent de Ja créduli~é du public et répandent les vulgarisatio11s :historiques les . plus vulgaires . sous le . fallacieux prétexte de révéler de l'inédit sur la Révolution russe.* .- Le _« train scellé », plus -couramment désigné -.« wagon plombé >;, souvent devenu « train .blindé » _(sic), n'a jamais impliqué le moindre mystère et n'offre aucun thème à de prétendues révélation~. Une phrase -de _Ludendorff mille fois citée, très , . ' •:Vague et ecnte apres coup, ne prouve aucune :connivence entre le Reich et les voyageurs du _wagon : « En envoyant Lénine en Russie, notre ._gouvernement assumait une lourde responsabilité, _mai~elle était justifiée du point de vue militaire car il fallait à tout prix hâter la défaite de la Russie » (général Ludendorff : Souvenirs de. guerre). Plus .tard, Ludendorff écrivit qu'il n'avait « aucune idée .de Lénine, de Kienthal » et s'était borné.« à suivre ,11niqµement les indications du gouverne.ment » :{lettre du 20 octobre 1937 à R .. Fester). Le général -Max Hoffmann, dans la Guerre des occasions .perdues, justifie aussi comme« arme de propagande» .. . . - ce qu'il croit, à tort, être une initiative allemande. En fait, il n'est pas vrai que le gouvernement _.all~mand (d'aucuns disent : le grand État-Major, d'autres : le -Kaiser) ait « envoyé » Lénine et ses .proches en Russie, et il est faux que Lénine ait ~nclu un pacte politique ( do ut des) avec l'impé- · • Les articles tal)ageurs de Life, hebdomadaire américain illustré, reproduits en Angleterre, en France et ailleurs dans des journaux qui ne se distinguent ni l,)ar le sérieux, ni l)ar la compétence, ne font vraiment l)as honn!ur à la l)resse occi- -,d~ntale. Ils se l,)résentent comme la «condensation» d'un livre bâclé par un journaliste quelconque im1'rovisé « historien Populaire » 1 mais plutôt romancier-feuilletoniste, avec le ,concours dune «.équil,)e internationale d~érudits » (sic) qui ont, pour l'essentiel, coml)ilé de troisième ou quatrième matn leurs lieux communs dans divers livres l,)ris au hasard. Cette compilation •dramatisée•, selon l'exl,)ression américaine, aurait exigé (Lif e, 17 mars, 1,). 37) un an et demi de travail à ladite équil,)e : n'imi,orte quel écrivain à la 1'lume facile e6t fait beaucoui, mieux tout seul en six semaines, dans une bonne bibliothèque. On rougirait de rei,roduire les aft1rmations hasar~es l,)our annoncer la version française où l'auteur devient« le journaliste qui consacra dix ans de sa vie à cette étude•. Qu'il suffise de noter tristement que ces • mœura des diumales », singulièrement aggrav~s depuis Marcel Schwob, ne font que servir la cause commuruste. D'autre part la Pensée Russe, journal publié à Paris, a consacré au voya1e de Uninc à travers l'Allemaanc une page endàe dont le moins Qu'onl,)uisse dire est Qu'elleest indi~e d'une preste qui se respecte. Son directeur s'en convaincra, peut~re, en lisant nos dcux.i,aaes. , Biblioteca Gino Bianco riali_smeallemand, comme tant d'auteurs le répètent sans rien savoir. La vérité, connue à l'époque, se suffit à elle-même et la légende ne sert en rien la critique du ·bolchévisme~ Aussitôt après la chute du tsarisme, la question du retour . en Russie se posait pour les émigrés politiques de toutes nuances, parmi lesquels « social-patriotes »et« défensistes » étaient beaucoup plus · nombreux que le petit .groupe léniniste. Les autorités britanniques refusaient aux Russes habitant ·la ·suisse l'autorisation de passer par l'Angleterre~ Un comité pour l'évacuation des émigrés, réuni à Zurich, et où 23 groupes d'étiquettes politiques différentes étaient _représentés, prit acte à l'unanimité du refus gouvernemental anglais de laisser _lessocialistes .russes rentrer dans leur pays. Le 19 mars 1917, à Genève, se tint une réunion .où. participaient M. Natanson-Bobrov (au nom des socialistes-révolutionnaires), L. Martov (au nom des menchéviks), G. _Zinoviev (au nom des bolchéviks), Kossovski (au nom du Bund), et c'est alors que Martov suggéra de négocier le passage par l'Allemagne en échange d'internés allemands et autrichiens détenus en Russie. Ce plan fut adopté à l'unanimité. . . L'initiative vint donc de Martov, porte-parole .des menchéviks-internationalistes, adversaire des bolchéviks, et non de Lénine, et non de Berlin. 1 Le fait n'est pas contestable et il réduit à néant tout le verbiage qui s'est donné libre cours à propos du soi-disant accord politique entre Lénine et _l'Allemagne. Comme toujours en pareille circonstance, des objections surgirent quand il s'agit de passer de la théorie à la pratique, les émigrés discutèrent sans fin du qu'en dira-t-on, des avantages et des inconvénients, des précautions à prendre, etc. Tandis que Lénine, avec son esprit de décision, se ralliait d'emblée au projet de Martov et s'efforçait de convertir les paroles en actes. Pas n'importe comment, d'ailleurs. Il a envisagé successivement divers projets irréalisables : se procurer un passeport de Suédois sourd-muet, passer les frontières avec des contrebandiers, etc. Entre le 21 et le 23 mars, il télégraphie à son camarade V. Karpinski : Le plan de Martov est bon : il faut le soutenir mai nous (et vous) ne pouvons le faire directement. On ,zous soupçonnera. 11 faut qu'outre Martov, des Russe sans-parti et des Russes patriotes s'adressent aux ministres suisses (et à des gens influents, des avocats, te., ce qu'on peut faire à Genève) en leur demandant d'en 1. Cf. N. Kroupskaia : Ma vie av c L,nin . Paris, Pa t. 1933, ~- 264 ; ~- Souvarine : Stali,ie. Aperçu .histori_g_u du bolchévisme. Paris, .Pion, 1935, p. 146; V: I. Lm.in : Œuvre t. xx1v, Moscou, Edition de l'l!tat, 1952 pp. 8-10; t. xx:xvt. i,i,. 381 et 634.
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