Le Contrat Social - anno II - n. 1 - gennaio 1958

18 La conclusion que Bouchouïev tire de ces arguments est purement « stalinienne » : Quelle que soit la sévérité dont on fasse preuve dans l'appréciation de la politique coloniale du tsarisme, on ne saurait nier que la Russie ait joué un rôle progressiste à l'égard des peuples caucasiens. Par conséquent toute idéalisation du muridisme est une manœuvre antisoviétique. La lutte contre les survivances féodales et religieuses doit comprendre aussi la lutte contre le muridisme réactionnaire caucasien, en partant des positions de l'athéisme scientifique, des positions marxistes-léninistes .•• Nous voici donc revenus à l'époque où Baghirov pourchassait les « nationalistes bourgeois » • caucasiens. L'article de S. K. Bouchouïev représente., selon toute probabilité., le point de vue officiel actuel du PC de l'URSS. Il reprend., en les édulcorant à peine., les thèses de Baghirov : le muridisme, l'islam en général et les mouvements politiques antirusses de libération nationale doivent être considérés comme réactionnaires. Ne sont progressistes que les mouvements qui s'appuyaient sur les révolutionnaires russes et tendaient à un rapprochement avec la Russie révolutionnaire. Si l'on extrapolait les conclusions en les appliquant au monde musulman extérieur, il faudrait admettre qu'à l'heure actuelle les seuls mouvements « progressistes » dans le monde arabe (musulman) sont ceux qui, ne s'appuyant pas sur les tendances nationales et religieuses, travaillent la main dans la main avec les forces « véritablement progressistes » que sont les partis communistes, l'URSS et le « bloc socialiste ». N'est-ce pas là un retour au stalinisme intégral, c'est-à-dire un retour à ce même impérialisme grand-russien, centralisateur et chauvin que ---- .. , BibliotecaGinoBianco LE CONTRAT SOCIAL N. Khrouchtchev avait récemment dénoncé parce qu'il empêchait la communisation du monde et colonial » ? Le circuit est ainsi fermé. La brève tentative de revenir à l' « internationalisme », à débarrasser le communisme de sa forme proprement « russe » a échoué. Dorénavant, comme sous Staline, l'URSS semble vouloir être, en matière de politique desnationalitéset malgré des déclarations démagogiques - la continuatrice de la Russie tsariste, avec tout ce que cela implique : primauté politique et spirituelle du « grand peuple russe, frère aîné des peuples soviétiques», justification de la politique tsariste, refus de reconnaître un caractère positif aux mouvements antirusses., etc. Mais une telle « plate-forme idéologique» peutelle correspondre - sur le plan de la politique extérieure en Asie et au Moyen-Orient - à une expansion du communisme? N'est-elle pas un aveu indirect des contradictions de la doctrine soviétique des nationalités qui doit concilier deux facteurs opposés : les intérêts de la propagation du communisme en Asie, ~ui impliquent l'égalité des peuples., et ceux de la Russie, qui exigent la primauté du peuple russe? Tout relâchement du contrôle russe sur les peuples musulmans de l'URSS provoque in~vita- . blement la recrudescence du mouvement nattonaliste antirusse. Mais tout dùréissement antimusulman sur le plan intérieur crée un obstacle supplémentaire à la propagation de l'influence soviétique au Moyen-Orient. L'article de Bouchouïev n'est-il pas finalement l'aveu des difficultés que rencontre la politique de rapprochement russo-arabe et islamocommuniste? A. BENNIGSEN , . ' • • •

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==