P. LANDY rements » ultérieurs, mais reconnaissait la part décisive qu'il avait joué dans le sauvetage de plusieurs officiers de l' AVH en s'opposant à leur exécution sommaire par les insurgés. Trois mois plus tard, Foeldes était condamné à mort sous prétexte d'avoir lui-même cc organisé » le massacre de membres de l' AVH. Les communistes cc égarés » ne tardèrent pas à être rejoints dans les prisons par les hommes de confiance des divers partis non communistes dont l'éphémère renaissance avait marqué la phase libérale du gouvernement Nagy. Parmi eux se trouvait Istvan Bibo, Laszlo Kardos et Attila Szigethy, représentants respectifs des socialistes, des catholiques et des paysans petits-propriétaires. La vague répressive s'est étendue à l'ensemble de la population. Selon des sources dignes de foi, il y a eu au moins quarante mille arrestations et vingt mille emprisonnements administratifs. Le régime n'a annoncé de manière publique que cent cinq condamnations à mort, mais le nombre des « liquidations » secrètes se monterait à plusieurs milliers. Tout en se glorifiant de cc victoires décisives » contre l' cc opposition », le Parti continue à faire appel à une vigilance redoublée. « La bataille est loin d'être finie, car nos ennemis essayent de s'infiltrer dans le Parti, l'appareil d'État et les organisations de masse ! », s'écrie Blet es irodalom (29 juin 1957). Après le remaniement de la direction suprême à Moscou, le régime alarmé redoubla ses avertissements : cc Les cercles révisionnistes vont certainement tâcher d'utiliser les résolutions de Moscou pour les fins qui leur sont propres ! », annonçait Blet es irodalom dès le 4 juillet - et, durant tout l'été, de prétendus complots furent «· découverts », des espions « démasqués » ; les arrestations se multiplièrent, les menaces redoublèrent ... La Hongrie d'aujourd'hui est redevenue le pays de la peur ; presque tout le monde, selon la correspondance reçue, vit dans l'appréhension d'être livré à la vengeance des communistes ou du moins d'être arrêté. Malgré cette atmosphère de terreur, le fait le plus frappant qui se dégage des rapports parvenant de Hongrie, est l'existence d'un puissant sentiment de « solidarité souterraine » au sein du peuple hongrois. Malgré le règne de la crainte, les habitants continuent individuellement et par groupes à montrer de diverses façons leurs véritables sentiments. BibliotecaGinoBianco 321 Survivance de l'esprit de liberté C'est ainsi que le Nepszabadsag, dans son numéro du 23 juin 1957, s'est plaint, par la plume de Karoly Kiss, du fait que des centaines de personnes s'ingénient à défendre les accusés emprisonnés, s'efforçant d'organiser de véritables « actions de secours ». Lorsque les membres de l'AVH participant à un tribunal d'exception mirent en minorité le président et lui imposèrent l'exécution de deux jeunes écrivains, ce magistrat donna sa démission ; les médecins de Budapest n'hésitèrent pas à collecter ouvertement trois cent mille forints pour aider les familles des prisonniers politiques. Ces quelques exemples montrent que le cri du cœur n'est pas étouffé par le bâillon de crainte et de suspicion que le régime !Zadar impose au peuple hongrois. Les signes manifestes de résistance pacifique constituent, pour le communisme en Hongrie, un démenti qui, au même titre que la révolution armée, le contraint à perdre la face. A certains égards cependant, le gouvernement Kadar a réussi à créer une impression superficielle de reprise et de guérison; on s'est livré à une activité fiévreuse pour effacer les traces visibles de l'insurrection; à Budapest, les immeubles mitraillés ont été replâtrés, et bon nombre de constructions neuves se poursuivent ; même les foules qui circulent dans les rues sont un peu mieux habillées et un peu mieux nourries qu'elles ne s'attendaient à l'être après un désastre national. Mais l'atmosphère générale est celle d'un peuple excédé et épuisé, à qui sont refusés le répit et les récompenses qu'il croyait avoir gagnés par son sacrifice dans la révolution; et c'est là ce que le régime nè peut camoufler. L'enfant terrible de l'Europe occidentale, au prix d'incroyables sacrifices humains, est arrivé à cette conclusion qu'à moins de bouleversements futurs dans le monde soviétique son destin ne peut être en définitive changé que dans le cadre d'un règlement européen. Cependant, la possibilité pour le communisme de s'assurer le soutien réel du peuple hongrois dans une mesure quelconque est défini-- tivement exclue. Si tenace que la classe dirigeante communiste puisse se montrer, le chapitre final de l'histoire de la révolution hongroise n'est pas , . encore ecr1t. (Traduit de l'anglais) PAUL LANDY •
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==