Le Contrat Social - anno I - n. 4 - settembre 1957

l B. SOUV ARINE graphie» serait vaine. Or il faudrait des caractères pour incarner une nouvelle politique. Les compétitions personnelles autour du Secrétariat, masquées de prétextes divers plus respectables, ne mettent pas en cause l'idéologie d'État demeurée exclusiviste qui, sous l' étiquette du «marxisme-léninisme », continue à justifier certaines pratiques instaurées par Staline et. 9-ue maintiennent les épigones. Tant. que la critique de Marx et du marxisme, de Lénine et du léninisme sont interdites dans l'Union soviétique, tant que les privilèges monstrueux du parti communiste sont intouchables, le prétendu· « marxisme-léninisme » ne signifie ri~n d'autre qu'un stalinisme qui n'ose pas dire son . nom, tout en perdant quelque peu de sa virulence. En outre l'insincérité dans la polémique, la malignité dans les règlements de comptes, le cynisme dans la falsification des vérités premières n'attestent que trop l'invétération du stalinisme. Le peuple de l'Union . , . , sov1ettque ne s y trompe pas, qui méprise les querelles de ses maîtres. La falsification des vérités de tout ordre, surtout~ dont l'usage constant chez les disciples de Staline comme chez leur maître s'étale avec une insolence particulière à l'occasion du quarantième anniversaire d'« Octobre», cet usage éhonté de la falsification interdit toute illusion quant à la réalité de l'évolution soviétique. Falsification sans retenue des faits, des textes, des statistiques, des. documents historiques, falsification même des œuvres écrites de Lénine - les pires moyens s?nt bons aux parvenus du stalinisme pour légittmer leur prétention à régenter l'univers. Ce ne sont pas les chiffres et coefficients spécieux de l'activité économique, ni mêmes les courbes ascendantes de la production des biens matériels qui peuvent révéler à court terme une humanisation_du régime. Le moindre respect de la vérité, le moindre égard envers un adversaire vaincu ou désarmé seraient éventuellement plus révélateurs : rien ~e tel n'apparait dans la dernière péripétie de crise au «sommet» de la dictature. Une fois de plus, et avec un éclat démonstratif. le Parti s'affirme sans gêne au-dessus de l'Éta; constit~tionnel et ses décisions se répercutent mécaruquement dans le gouvernement nominal où les déchus du Prresidium perdent ipso facto leurs positions ministérielles. Le Parti ordonne, l'État obéit, le Parti étant le super-État. Khrouchtchev ne mérite pas créance quand il accuse le trio Molotov-Kaganovitch-Malenkov d'avoir voulu imposer au Parti la primauté de l'État. Mais la série des griefs formulée contre le « groupe anti-parti » ( expression typiquement stalinienne) implique une sorte de programme Biblioteca Gino Bianco 215 d'action décelant une évolution empirique réelle sous la terminologie immuable. Même si tous les reproches qui accablent la minorité ne sont pas pleinement fondés, même si l'on fait la part de la mauvaise foi dans la version seule publiée du conflit, il s'avère que l'élan vital du capitalisme soviétique exige maintes .dérogations . , . . aux pratiques anterieurement en vigueur et qu'à l'intérieur du stalinisme une tendance novatrice sè heurte à la tradition routinière. Khrouchtchev et le clan qu'il représente sont bien incapables de penser autrement que selon les leçons apprises par cœur à l'école élémentaire du «marxisme-léninisme». Une inculture agressive et un psittacisme stérile caractérisent leurs discours prétentieux et leurs écrit~ illisibles. Après tant de massacres ordonné~ par Staline, il n'y a même plus parmi eux un seul homme de plume pouvant, à la rigueur, faire figure de théoricien. Dans leurs journaux et revues, ils se bornent à citer et paraphraser nlassablement les œuvres vieillies de Lénine. Mais depuis qu'ils sont livrés à eux-mêmes et qu'ils cherchent des solutions nouvelles aux problèmes devenus insolubles par les anciennes méthodes, leurs actes accumulés tracent une ligne de conduite qui, surtout en matière économique, diffère sensiblement de la précédente, toujours au nom du même dogmatisme. Une lente évolution pratique s'accomplit donc en contradiction avec l'immobilisme doctrinal. Or, dans la nouvelle classe profiteuse que Milovan Djilas ** dénonce à juste titre mais un quart de siècle en retard, il n'y a pas de penseur déclaré pour réviser des conceptions fausses. Les épigones de Staline, produits d'une sélection à rebours sous une terreur avilissante, ne sont pas de taille à suivre l'exemple du Lénine de 1921 qui, au «communisme de guerre », substitua la « nouvelle politique économique» et eut la capacité intellectuelle d'en tirer les conséquences (tout en gardant l'illusion de convertir la nep en socialisme). Ils ne savent qu'user de technique stalinienne pour discréditer des contradicteurs auxquels ils refusent la parole en public ; ils les traitent de sectaires et de conservateurs pour gagner quelque approbation populaire, mais ils n'ont •• Le livre de M~lovan Diilas: The Nciv Glass, publié à Nc,v York ~hez Frederiçk A. Praeger e~ août dernier, a déjà un retentiss~ment con~idérabl~. Son éditeur le Qualifie de cc Manifeste anu-com~unist~ ». ~ auteur, actuellement en prison à B~l~rade, a fait partie dune sorte de Quadrumvirat qui a dirigé le mouvement communiste yougoslave et comi,osé de Tito, K~i:delj, Djtlas et ~ankovitch. Ses désacords avec les a,utr~s dirigeant~ 1ont fait exclure du Parti et sa critiQue de 1attitude d~ Tito lors de la révolution hongroise ( 1956) lui ont valu trois ans de travaux forcés. Il sera rendu compte de ses vues sur la nouvelle classe, la bureaucratie communiste dans un de nos prochains numéros. '

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