Le Contrat Social - anno I - n. 3 - luglio 1957

• . , . LE MANIFESTE DE LA DÉMOCRATIE << HOMMAGE A VICTOR CONSIDERANT >> par A. L.* DANS son étude récente sur le Manifeste Communiste, Charles Andler a fait des recherches sur les origines du fameux écrit. Par chance, j'ai trouvé ces jours-ci le document que Tcherkezov reconnaît, avec beaucoup de raison, pour celui qui a fourni non seulement les thèses fondamentales de l'argumentation du Manifeste, mais aussi la forme de l'exposé. Il s'agit d'une brochure à présent très rare et intitulée Principes du socialisme. Manifeste de la Démocratie au xixe siècle, par V. Considerant, publiée pour la première fois par la Librairie Phalanstérienne le 1er août 1843 **, et la seconde édition en octobre 1847. Ainsi la première édition de ce manifeste étrange mais très instructif précéda de cinq ans celle du Manifeste Communiste. J'ai fait ma trouvaille en fouillant dans une quantité de brochures fouriéristes · bizarres et curieuses d'une bibliothèque à vendre de quelque fouriériste napolitain inconnu et qui vivait probablement vers 1848 ... Le Manifeste de la Démocratie est divisé en deux parties : 1) l'état de la société ; 2) l'état des conceptions. Il contient 74 pages serrées et divisées en chapitres et paragraphes. L:es 26 pages de la première partie, quelquefois fantastique par la .forme mais exacte au fond, contiennent toutes les idées principales du premier chapitre du Mani! este Communiste. La seconde partie analyse les doctrines et les principes des différents partis politiques français, du point de vue fouriériste. Il est certain que cette partie du manifeste de Considerant a dû suggérer à Marx et à Engels le troisième chapitre de leur manifeste qui passe en revue l'état de la littérature communiste jusqu'à 1847. Seulement Engels l'a fait d'un point de vue international, tandis que le fouriériste Considerant l'a faite d'un point de vue exclusivement français. _ On sait que les thèses fondamentales du Manifeste Communiste se résument comme suit : 1) le développement de l'histoire résulte de la lutte des classes entre elles ; 2) le prolétariat des temps modernes est poussé • Article paru sous le premier titre dans l' Avanti du 24 mars 1902, et sous le second dans les Temps Nouveaux, n° 311 décembre 1904. Pour d'autres détails, notamment sur l'identité de l'auteur, voir l'introduction, avant-dernier alinéa, p. 194. • • Il est peu probable que ce fftt l '' aoftt. Dans l'édition de 1847, Considérant sianale que son Mani/este fut écrit en • aoàt 1843 •. N.d.l.R. Biblioteca Gino Bianco par la force des choses à briser l'ordre social existant, parce que le développement économique de· la société capitaliste le condamne à une misère toujours croissante ; 3) la concentration capitaliste ininterrompue ruine les classes moyennes et accentue l'antagonisme entre la bourgeoisie et le prolétariat; 4) l'incapacité de la bourgeoisie à diriger la production est prouvée par les crises économiques que suscite la surproduction. Eh bien! toutes ces thèses et encore bien d'autres idées secondaires se trouvent dans le Manifeste de la Démocratie, quelquefois sous une forme naïve et fantastique, mais toujours nette et déterminée. Le manifeste de Considerant établit que « l'ordre nouveau s'est dégagé de l'ordre féodal par le développement de l'industrie, des sciences, du travail, par les lentes mais irrésistibles conquêtes de l'intelligence sur la force, du génie de la création sur celui de la guerre». Il affirme que la Révolution française n'accomplit qu'une œuvre négative : elle renversa l'ancien ordre social, mais sans créer un ordre nouveau conforme à sa doctrine d'égalité devant la loi. ... Bien que le droit public nouveau ne reconnaisse plus aucune indignité naturelle des personnes ou des classes; bien qu'il proclame très démocratiquement, au contraire, l'égale aptitude politique et sociale de tous à tout : les hautes et moyennes positions politiques, industrielles, financières et commerciales, presque toutes les fonctions publiques, presque toutes les fonctions libérales, n'en sont pas moins monopolisées de fait par les familles des hautes classes et des classes moyennes, qui les conservent et se les transmettent. (§ IV, p. 5, éd. 1847). Une féodalité nouvelle se constitue et l'asservissement des masses se perpétue. La cause de ce fait? La libre concurrence. Que pourrait-il résulter, dans un pareil état de choses, de cette liberté industrielle sur laquelle on avait tant compté, de ce fameux principe de la libre concurrence que l'on croyait si fortement doué d'un caractère d'organisation démocratique i Il n'en pouvait sortir que l'asservissement général, l'inféodation collective des masses dépourvues de capitaux, d'instruments de travail, d'éducation, d'armes industrielles enfin, à la classe industriellement pourvue et bien armée (§ V, p. 7). La libre concurrence fait que le salaire de l'ouvrier diminue toujours de plus en plus.

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