Le Contrat Social - anno I - n. 2 - maggio 1957

QUELQUES LIVRES régions où l'on n'attend tout simplement pas des partis qu'ils suivent la ligne générale ». S1 LA DISTANCE gêne Kautsky dans son travail, on peut se demander si au contraire M. Masani n'est pas gêné par la proximité de son sujet. Masani fut l'un des fondateurs du parti socialiste indien .et il traite du communisme sur la foi de longs contacts directs. Pourtant il a tenté d'écrire un ouvrage historique d'érudition plutôt que des mémoires personnels et le résultat semble rester quelque part entre les deux. Bien que son livre soit précieux et d'assimilation facile, des ouvrages plus complets le remplaceront probablement, avec le temps, et l'on ne peut qu'espérer que M. Masani lui-même fera suivre ce premier livre de souvenirs personnels plus étendus. Dans une progression chronologique, Masani récapitule les sept phases principales de l'histoire du communisme indien - période de fondation jusqu'en 1929 ; « désert » de 1930 à 1935 ; front commun d'avant-guerre; deuxième guerre mondiale; glissement vers l' « insurrectionnisme » de Ranadive ; retour à la tactique de non violence ; enfin phase parlementaire actuelle, qui date de l'adoption du programme de 1951 avant les pre- -mières élections générales. Le développement parfois sommaire et quelque peu polémique de cette chronologie souffre de la comparaison avec les définitions précises des nuances doctrinales qu'offre Kautsky. Dans ses excellents premiers chapitres, Masani utilise un résumé encore inédit des activités communistes en Inde jusqu'en 1933 inclus, préparé pour l'usage confidentiel du ministère britannique de l'Intérieur en Inde, document que Masani avait pu obtenir au temps où il était socialiste. Ces BibliotecaGinoBianco 133 chapitres seront certainement durables. Quant au reste de la narration, elle est remarquable par la manière dont l'évolution communiste est rattachée à l'histoire générale de l'Inde. Masani offre une perspective qui est absente de la dissection clinique de Kautsky, où la ligne communiste indienne est presque totalement divorcée d'avec son milieu. En même temps l'analyse serrée de Kautsky est plus impressionnante que la relation relativement rapide de Masani. Celui-ci soutient dans les dernières pages que « l'homme instruit de la classe moyenne » constitue la base même du communisme indien, mais ce thème qui force l'attention est offert presque comme une réflexion après coup. Si Kautsky considère la transmission des directives de Moscou aux partis communistes locaux essentiellement sous l'aspect des proclamations doctrinales publiques, Masani, lui, parle d'émissaires et d'intermédiaires, soulignant particulièrement les relations semi-impérialistes entre l'oracle communiste anglais Palme Dutt et les communistes indiens. Dès 1924, dit nettement Masani, le parti communiste anglais « avait tendance à monopoliser l'Inde comme sa province propre ». Palme Dutt devint « le pandit qui fixe la ligne au PC indien, rôle qu'il joue encore aujourd'hui». Aux premières pages du livre, nous apprenons les noms d'emprunt et les codes en usage dans les contacts de Dutt avec le PC indien dans les années 20 ; ensuite, que des Indiens « réussirent à aller en Angleterre sous divers prétextes tels que raisons de santé ou affaires » pour recevoir des instructions de Dutt. C'est là mettre légitimement l'accent sur un aspect significatif des relations des communistes indiens avec Moscou et caractériser l'information de première main qui manque dans l'austère érudition de Kautsky. S.S. HARRISON

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