M. G. FIELD en sa qualité officielle. Les certificats établis par un médecin privé ou par une polyclinique « payante » sont sans valeur à. cet égard. Le certificat lui-même est numéroté, un exemplaire étant gardé au service médico-sanitaire de l'entreprise, tandis que l'autre est remis au malade. Lorsque ce dernier reprend le travail, il remet son exemplaire au pointeau qui y note le type de travail effectué et le nombre des jours d'absence. Après vérification par le contremaître, le certificat est envoyé au service médico-sanitaire; là le médecin chargé de l'atelier où travaille le malade vérifie la pièce, l'enregistre et la transmet au service du personnel. Celui-ci inscrit, après examen du livret de travail de l'intéressé, la durée du travail ininterrompu effectué à l'usine. Le certificat est alors transmis au président de la Commission des assurances sociales de l'atelier qui le vérifie et inscrit sur la fiche syndicale de l'intéressé le fait qu'il lui a été délivré un certificat médical. C'est alors seulement, et sous réserve d'un avis favorable de la Commission, que le service de paie peut commencer à calculer le montant de l'allocation. 23 On peut supposer que les inspecteurs syndicaux ainsi que les médecins employés par le syndicat à cet effet surveillent constamment la courbe des -absences pour maladie et qu'un médecin qui accorderait régulièrement plus de congés de maladie que ses confrères serait sommé de s'expliquer. La liberté d'actio11 du médecin est également strictement limitée quant à la durée du congé de maladie qu'il peut accorder à un malade. En règle générale il peut donner trois jours et renouveler le certificat deux fois pour des périodes égales, mais aucun médecin n'a le pouvoir d'accorder à lui seul plus de dix jours de congé-maladie. 24 Le malade dont l'état nécessite une prolongation de congé est renvoyé devant une commission médicale consultative ( Vratchebnaïa konsoultativnaïa kommissia, ou V. K. K.) qui détermine en premier lieu si le congé initial était justifié et en second lieu, si le malade doit reprendre le travail, être gardé en observation ou hospitalisé. 25 Si l'invalidité est reconnue permanente, le malade est renvoyé devant la commission médicale d'expertise ( Vratchebnaïa troudovaïa expertiznaïa kommissia, ou V. T. E. K.) qui dépend du ministère de la Sécurité sociale et qui détermine le degré d'invalidité et le montant de la pension. Sa responsabilité quant à la délivrance des certificats d'invalidité temporaire pose pour le médecin une autre série de problèmes. Car en Union soviétique, où la constante campagne pour l'accroissement de la production et de la productivité s'accompagne de pénuries chroniques de maind' œuvre et de biens de consommation, le régime 23. « Monter la garde pour la santé des ouvriers », V Pomochtch Pro/essi·onalnomou aktivou [A l'aide des activistes J;>rofessionels], n° 12,_ juin 1953, pp. 23-24. 24. Spravotchnik admini"strativno-khoziaïstvennovo rabotnika medikosanitarnykh outchrejdeni [Guide du travailleur administratif-économique des services médico-sanitaires], Moscou, 1950, ordre n° 116, article 7, p. 337. 25. « Au sujet des bases cliniques ·de l'Institut» Meditsinski Rabotnik, 31 juillet 1955, p. 4. BibliotecaGino Bianco 59 juge nécessaire d'étayer les stimulants matériels de toutes sortes de pratiques et de lois répressives sur le travail. D'où le nombre considérable de ceux qui, en se présentant à la visite, cherchent à échapper aux pénalités prévues par les lois sur le travail en obtenant des dispenses médicales. 26 D'anciens médecins soviétiques qui travaillaient avant la deuxième guerre mondiale dans des dispensaires d'usine ou dans des kolkhozes rapportent qu'une grande partie de leur temps et de leurs forces était consacrée à s'occuper de ces simulateurs et violateurs des règlements du travail. Une femme médecin ukrainienne décrit la situation comme suit : C'est terrible. C'est une telle torture [moutchénié] que j'en ai encore des cauchemars. Beaucoup de travailleurs se portèrent malades lorsque furent mises en vigueur les lois sur le retard au travail [1940]. Au service médical des chemins de fer où je travaillais, on compta une bonne moitié de simulateurs. Tel d'entre eux prétend avoir besoin de repos ... peut-être veut-il faire la queue pour s'acheter un pardessus ou quelque chose. Ou bien il y avait des gens qui ne s'étaient pas réveillés à temps et étaient arrivés en retard. Comme il fallait faire la queue après la journée de travail, puis faire la cuisine, la vie était très dure. Aussi dormait-on d'un sommeil de plomb et il était difficile de se lever le matin. De plus, la majorité n'avaient pas de montres. Dès qu'un ouvrier voit qu'il est en retard, il va directement chez le médecin... Il y en a qui ont peur de dire la vérité et croient devoir tromper ; il est très difficile d'avoir affaire à ce genre de malades. Ils se mettent à inventer ce dont ils souffrent. Ils savent par exemple que le service radiologique est débordé et ils disent : « Je voudrais une radio ... », et si vous les ._y envoyez, ce sera déjà une raison pour arriver en retard au travail. 27 Ainsi, ce sont les médecins eux-mêmes qui doivent prendre des mesures pour endiguer le flot des consultants et ils deviennent habiles à séparer les simulateurs de ceux qui ont vraiment . besoin de leur attention. Comme le dit le médecin cité plus haut : ... Il y a les tire-au-flanc professionnels qui refusent tout simple1nent de travailler. Ceux-là voulaient spéculer sur les biens de consommation. Avec cette catégorie de malades nous étions naturellement très stricts. Ils voulaient gagner de l'argent et tromper le médecin. 28 Mais tous les cas ne sont pas de ce type. Comme l'a dit un médecin interrogé : Que croyez-vous que nous éprouvions quand une femme venait nous supplier en pleurant : « Camarade docteur, donnez-moi juste u11jour de congé, je voudrais aller chez ma mère au village et rapporter quelque chose à manger pour mes enfants qui ont faim. >> 29 26. Pour une étude complète de l'év.Jlution récente de la législation soviétique du travail, particulièrem'.!nt en matière de congés de maladie et d'in:iemnités d'invalidité, voir Jerzy Gliksman, « Récentes tet1dances de la législation soviétique sur le travail», Problems of Comnunism, no. 4, vol. 5 (juillet-août), 1956. 27. Protocoles, no. 1379, pp. 29-30; également no 607, pp. 24-25. 28. Ibid., no. 1379, p. 31. 29. Ibid., no. 1800, p. 4.
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