B. LAZITCH annoncer qu'elle l'est dès maintenant n'est qu'une anticipation».* Malheureusement pour le statisticien, les Hongrois ont prouvé que l'état d'esprit d'une génération à venir ne peut se calculer comme la production du charbon et que dans la lutte entre le système communiste et l'homme, l'homme n'a pas dit son dernier mot. Cependant le plus grand mérite historique de la révolution d'Octobre hongroise reste d'avoir élargi l'horizon qui, même à de nombreux adversaires du communisme, paraissait fermé. Avant cet événement, on ne voyait guère la possibilité de venir à bout d'un communisme imposé par la force dans un pays : la guerre internationale et atomique était exclue à la fois par Moscou et par Washington, et le communisme passait pour un totalitarisme parfait contre lequel tout sursaut d'un peuple était impossible. La récente révolution hongroise (et dans une certaine mesure la victoire de Gomulka en Pologne) a ouvert une nouvelle perspective : le commurJsme ne paraît plus monolithique et sans failles, il est en proie à des crises dont les germes se trouvent dans le système même, sans épargner les cercles dirigeants. Le fait que le régime communiste en Hongrie s'est effondré comme un château de cartes et que la résistance s'est poursuivie sous des formes multiples * A. Sauvy, Le pouvoir et l'op ·nion Paris, 1949, p. 165. BibliotecaGino Bianco 1.- 45 même après la répression militaire prouve que des for ces d'opposition et de désagrégation agissent à l'intérieur de la société dite communiste, sous le premier système totalitaire qui ait absolument soumis à son pouvoir tous les secteurs de la vie publique (comme l'Église ou l' Armée), ce que ni Mussolini ni Hitler n'avaient réalisé. Dans l'immédiat, la victoire revient aux divisions soviétiques et le sort de la Hongrie semble désespéré. Mais il est erroné de porter un jugement définitif du fait de l'action des blindés soviétiques. Après la défaite de la révolution de 1905 en Russie, le père du marxisme russe, G. Plékhanov, dit avec résignation : « 11 ne fallait pas prendre les armes. » D'autres marxistes russes comme Lénine se dressèrent en défenseurs résolus du mouvement vaincu, et lorsqu'en février-mars 1917 eut lieu la révolution, cette fois victorieuse, tout le monde fut d'accord pour reconnaître que 1905 avait été une répétition générale et que sans 1905, il n'y aurait pas eu de 1917. Aujourd'hui, le seul critère décisif pour bien juger la révolution d'Octobre hongroise est la question : l'Union soviétique, son glacis de satellites et le communisme international sont-ils moins forts aujourd'hui qu'avant ce fait historique? La réponse ne fait aucun doute. BRANKO LAZITCH •
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