L'expérience • communiste LES PROCÈS DE MOSCOU ''RÉVISÉS'' par Hugo Dewar Pendant des années, la propagande soviétique et ses auxiliaires occidentaux ont présenté la . . . , . « Justice sov1et1que » comme un pas en avant de la science juridique. C'est ainsi que le juriste anglais D. N. Pritt écrivait, dans un panégyrique contemporain des procès « d'épuration » de Moscou dans les années trente, que « la magistrature et le procureur de l'U. R. S. S. [André Vychinski] ont établi leur réputation parmi les systèmes juridiques du monde>> 1 • Pritt n'était nullement déconcerté par le fait singulier, sans parallèle dans la jurisprudence occidentale, que les accusés des procès soviétiques ne bougeaient pas le petit doigt pour se défendre mais avouaient avec un empressement apparent les crimes les plus atroces et les moins vraisemblables. Le gouvernement soviétique, affirmait-il suavement, « aurait préféré voir tous les accusés ou la plupart plaider non coupables ou contester les charges >> 2 • La feinte naïveté, ou l'aveuglement voulu, de pareilles déclarations était depuis longtemps évidente. Dès 1937, une commission indépendante se livra à une vaste enquête sur les procès de Moscou de 1936 et 1937 et établit qu'il s'agissait d'une parodie de justice manifeste. 3 Les constatations de la commission furent étayées par une accumulation croissante de preuves quant aux méthodes employées pour provoquer 1. The Moscow Trial Was Fair (Londres., Russia Today, sans date). 2. The Zinoviev Trial (Londres., Gollancz., 1936). 3. Cette commission était présidée par le philosophe John Dewey. Ses conclusions font l'objet de deux ouvrages., The Case of Leon Trotsky (Londres., Secker & Warburg., 1937) et Not Guilty (Londres., Secker & Warburg., 1938). Biblioteca Gino Bianco l'empressement évidemment anormal des accusés à signer leur propre arrêt de mort. Aujourd'hui, l'apologiste même le plus naïf ne saurait continuer de se leurrer. Au XXe congrès du P. C. de l'U. R. S. S., le mythe a été détruit à jamais, et par nul autre que Nikita Khrouchtchev. Dans son discours à huis clos, il a révélé jusqu'à quels; abîmes était tombée la « justice >>soviétique sous Staline : Staline créa le concept d' « ennemi du peuple». Ce terme rendait automatiquement inutile de prouver les erreurs idéologiques d'un homme ou d'hommes engagés dans une controverse... La formule fut introduite avec le dessein précis d'annihiler physiquement ces personnes ... 4 Il est· cependant significatif qu'en dénonçant les «violations de la légalité socialiste », Khrouchtchev n'ait fait mention directe ni du procès spectaculaire comme tel, ni de son exportation chez les satellites. Ses remarques au sujet de Zinoviev et de Kamenev, ainsi que de «l'annihilation» comme « ennemis du Parti» des plus proches compagnons de Lénine, étaient en outre 1,1netentative manifeste de limiter la discussion aux «violations de la légalité socialiste» pendant la période qui suivit l'assassinat de I<.irov en décembre 1934 - aux grands procès et épurations des années trente. 5 4. The Anti-Stalin Campaign and International Communism : A Selection of Documents (New York, Columbia University Press., 1956), p. 13. 5. Pour une discussion complète de ces procès, voir le livre de l'auteur, The Modern Inquisition (Londres, Allan Wingate., 1953).
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